- Mimoun Charqi - ANALYSE POLITIQUE ET JURIDIQUE -

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8. LA GUERRE CHIMIQUE CONTRE LE RIF

Conférences et études sur la guerre chimique contre le Rif


FORUM HISPANO MAROCAINPOUR LA MEMOIRE COMMUNE ET L’AVENIR

APPEL POUR UN FORUM HISPANO MAROCAIN

POUR LA MEMOIRE COMMUNE ET L’AVENIR.

  

Communication faite à l’occasion du colloque international sur le thème : « Mémoire et droits humains : enjeux et perspectives », ayant eu lieu à Genève, au Palais des Nations Unies, les 23 et 24 novembre 2006.

 

Assurément le thème « Mémoire et droits humains : enjeux et perspectives », retenu par les organisateurs de ce colloque international est fort important. Les différentes communications prévues au programme sont tout aussi importantes et intéressantes. Cependant, les participants risques d’être frustrés, car la question de la « mémoire et des droits humains » ne saurait être réduite au problème de l’esclavage, ni au rapports entre l’homme blanc et l’homme noir. Ce qui est sûr c’est que le présent colloque sera loin de clore le sujet.

 

Les crimes et atteintes aux droits de l’homme peuvent être distingués selon plusieurs catégories : Il y a ceux qui sont connus, comme c’est le cas de l’esclavage, il y a ceux qui le sont moins et il y a ceux qui ne sont pas du tout connus et ont été ignorés car gardés longtemps durant secrets.

 

Or, je voudrais vous entretenir justement de crimes ignorés. Aujourd’hui, tous ceux ici présents savent pour quelles raisons Sadam Hussein, le président irakien déchu, est jugé. Il est jugé, notamment, pour avoir utilisé des armes chimiques de destruction massive contre le peuple Kurde. Mais combien de personnes savent que l’Espagne et la France ont utilisé les mêmes armes chimiques de destruction massive que Sadam Hussein, contre les populations rifaines, dans le Rif, au nord du Maroc, entre 1923 et 1926 ?

 

Le plus grave, dans tout cela, c’est que les héritiers des victimes d’hier continuent encore aujourd’hui de souffrir des effets et séquelles consécutives à l’utilisation de ces mêmes armes chimiques de destruction massive. Car, il se trouve que ces armes chimiques ont des effets cancérigènes et mutagènes. Plusieurs experts et généticiens, telle que le professeur Christine Gosdène, titulaire de la chaire de médecine génétique de l’Université de Liverpool, qui a travaillé sur le cas irakien de Halabja, ont pu démontrer que plusieurs générations après une mutation s’observe dans les gènes des individus. C’est ainsi qu’il n’y a pas une famille dans le Rif n’ayant pas un parent atteint de cancer, notamment du larynx. A tel point que 80 % des personnes atteintes de cancer qui se font soigner à Rabat, la capitale du Maroc, proviennent du Rif. Or, ils vont à Rabat car c’est le seul endroit où ils peuvent se faire soigner. Mais, quant on sait que le Rif est une région pauvre et marginalisée, combien peuvent se permettre de se déplacer et résider à Rabat pour se faire soigner ?

 

Mais, encore, qu’en est-il exactement de ces armes chimiques de destruction massive et pourquoi  est ce un crime contre l’humanité que de les avoir utilisé ? Longtemps durant, des euphémismes ont été utilisés pour qualifier ces armes : « bombes X », bombes spéciales », « gaz toxique ». Il s’agit en fait d’ypérite (gaz moutarde), de chloropicrine et de phosgène. La qualification d’usage actuelle de ces armes est celle d’armes chimiques de destruction massive. Ces armes se trouvent avoir été interdites. Déjà à la fin du 19e siècle, la première conférence de la Haye, du 29 juillet 1899, signée entre nations européennes, interdit l’emploi de projectiles ayant pour but de répandre des gaz asphyxiants ou délétères. Le Traité de Versailles du 28 juin 1919, prévoit également la prohibition des armes chimiques de destruction massive. Le Traité de Washington du 6 février 1922 mentionne ces interdictions à son article 5. Le protocole de Genève, du 17 juin 1925, interdit quant à lui les gaz asphyxiants, toxiques ou similaires,… Ces interdictions ont étés confirmées et développées par la suite par divers autres instruments internationaux. 

 

Ainsi, le droit international à partir de la fin de la première guerre mondiale a interdit l’usage de certaines armes dites non conventionnelles. Il en est ainsi des armes chimiques et biologiques de destruction massive. Du point de vue légal, la production, la vente, l’utilisation ou même le stockage des armes chimiques de destruction massive sont strictement prohibés par le droit international public.

 

Il est indéniable qu’à travers la guerre chimique contre le Rif, il y a eu une violation caractérisée des préceptes essentiels du droit international public et du droit international humanitaire. Il s’agit d’un crime contre l’humanité, doublé d’un génocide exercé contre un peuple libre de paysans. Or par définition, les crimes contre l’humanité sont des crimes imprescriptibles. Pourtant, cela n’a pas empêché l’Espagne et la France de violer, à ce jour impunément, ces interdictions en faisant usage d’une guerre chimique d’agression contre le Rif et ses populations. Outre celles des Etats espagnol et français, la responsabilité de la société française Schneider S.A, [depuis Schneider electric] et de la société allemande Stolzenberg pourrait être retenue.

 

Ce n’est que ces dernières années, grâce au travail d’historiens, suite à l’ouverture des archives espagnoles et françaises que tous ces crimes contre l’humanité sont apparus. Après moult difficultés, nous avons pu tenir, au Maroc même, un colloque sur le thème de la guerre chimique contre le Rif. Ensuite, un travail s’est fait avec des députés catalans qui nous soutiennent. Un texte publié au bulletin officiel des Cortès est déposé au parlement espagnol qui devrait être discuté et qui comporte une reconnaissance officielle, une condamnation et des mesures de réparation.

 

Ce sont pour ces raisons et pour bien d’autres que nous faisons appel à la tenue d’un colloque international sur le même thème général que celui d’aujourd’hui à savoir « Mémoire et droits humains » qui permettrait de débattre et de rendre compte des effets pervers et néfastes multiples et encore actuels du passé de l’Etat colonial espagnol au Maroc, selon la plate forme introductive qui vous a été distribuée. Mais pas seulement un colloque pour tenir un colloque. Puisque le but de ce symposium qui a déjà reçu un accord de principe serait également l’occasion de penser et de construire un Forum hispano marocain pour la mémoire commune et l’avenir.


02/07/2010
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PROPOSITION DE LOI SUR LA GUERRE CHIMIQUE CONTRE LE RIF

PROPOSITION DE LOI SUR LA GUERRE CHIMIQUE CONTRE LE RIF

 

(NB : Ce projet a été adressé à l'ensemble des partis politiques marocains représentés au parlement)

 

 

Proposition de Loi N°…………… _ ………...

 

 

Préambule

(Exposé des motifs).

 

Au Nord du Maroc, le Grand Rif, lors de la guerre du même nom menée par Mohamed Abdelkrim El Khattabi, entre 1921 et 1926, l’Espagne et la France se sont rendues coupables de l’usage d’armes chimiques de destruction massives prohibées par les conventions internationales. Divers historiens et chercheurs, tant espagnols, (Juan Pando, Maria Rosa de Madariaga, Carlos Lazaro et Angel Vinas), allemands, (Rudibert Kunz, Rolf Dieter Muller et Dirk Sasse), anglais, (Sebastien Balfour), marocains, (Ahmed El Hamdaoui et Mimoun Charqi), et autres, sur la base des archives et documents militaires espagnols et français rapportent la responsabilité de l’emploi des armes chimiques de destruction massive par l’Espagne et la France ainsi que la société Schneider et la société Stolzenberg contre le Grand Rif et les rifains. Les actes du colloque international tenu à Nador, à la Chambre de commerce d’industrie et de services, le 14 février 2004, à l’initiative du journal Le Monde Amazigh, mettent en exergue le problème de la guerre chimique contre le Rif. Les députés Catalans Juan Tarda i coma et Rosa Maria Bonas i Pahisa ont souscrit et apporté leur soutien à la question avec la présentation d’une proposition de loi qui a été publié au bulletin officiel espagnol, sous le numéro 161/001169. (Boletin Oficial de las cortes generales. VIII legislatura. 7 septembre 2005, pages 5 à 7.). Des intellectuels, chercheurs et militants rifains et espagnols ont été invités au parlement espagnol (Cortes generales) afin de s’exprimer sur le sujet. Néanmoins, la proposition de loi n’a pas fait l’objet d’un débat en raison d’une coalition contre nature entre le Parti populaire et le Parti socialiste ouvrier espagnol.

 

Ces armes chimiques, en l’occurrence, l’ypérite, (gaz moutarde), la chloropicrine et le phosgène qui étaient connues sous le nom de « bombes X », « gaz toxique » ou « bombes spéciales » sont aujourd’hui reconnues sous la terminologie consacrée d’armes chimiques de destruction massive.

 

Déjà à la fin du 19e siècle, la première conférence de la Haye, du 29 juillet 1899, signée entre nations européennes, interdit l’emploi de projectiles ayant pour but de répandre des gaz asphyxiants ou délétères. Le Traité de Versailles du 28 juin 1919, prévoit également la prohibition des armes chimiques de destruction massive. Le Traité de Washington du 6 février 1922 mentionne ces interdictions à son article 5. Le protocole de Genève, du 17 juin 1925, interdit quant à lui les gaz asphyxiants, toxiques ou similaires,… Ces interdictions ont étés confirmées et développées par la suite par divers autres instruments internationaux.  Ainsi, le droit international a fait l’objet de violations lors de l’utilisation d’armes chimiques de destruction massives contre le Rif, au moment du soi disant « protectorat ». Du point de vue légal, la production, la vente, l’utilisation ou même le stockage des armes chimiques de destruction massive sont strictement prohibés par le droit international public. Outre celles des Etats français et espagnol, les responsabilités de la société française Schneider S.A, [depuis Schneider Electric] et de la société allemande Stolzenberg doivent être engagées conformément aux dispositions et préceptes du droit international et des droits humains.

 

A travers la guerre chimique contre le Rif, il y a eu une violation caractérisée des préceptes essentiels du droit international public et du droit international humanitaire. Il s’agit d’un crime contre l’humanité, doublé d’un génocide exercé contre un peuple libre de paysans. Par définition, les crimes contre l’humanité sont des crimes imprescriptibles. De surcroît, les héritiers des victimes d’hier continus de souffrir aujourd’hui même des séquelles engendrées par l’utilisation des armes chimiques de destruction massives qui, selon les experts reconnus, se trouvent avoir des effets cancérigènes et mutagènes. Des études et rapports d’experts internationaux affirment que ces armes de destruction massives ont des effets cancérigènes et mutagènes sur les héritiers des victimes d’hier, qui apparaissent plusieurs générations après ce qui explique la forte concentration de cancers divers parmi les populations originaires des régions du Grand Rif bombardées aux armes chimiques

 

 

Titre 1

 Condamnation de la guerre chimique contre le Grand Rif

 

Article 1er. En utilisant des armes chimiques de destruction massive, sous forme de bombes à base d’ypérite, de phosgène et de chloropicrine, de surcroît prohibées par le droit international, l’Espagne et la France, du début du 20è siècle, ont failli à leurs obligations en menant une guerre d’agression et en utilisant des armes non conventionnelles contre des populations sans distinction de leurs caractères civil ou militaire.

 

Article 2. Le recours à l’utilisation d’armes chimiques de destruction massive par l’Espagne et la France contre le Rif et les rifains est non seulement une faute mais surtout un crime contre l’humanité et revêt par conséquent un caractère imprescriptible.

 

Article 3. Les représentants de la nation condamnent de façon unanime, sans réserve, l’utilisation des armes chimiques de destruction massive contre le Grand Rif et les rifains entre 1921 et 1926, en tant que crime contre l’humanité.

 

Titre 2

Responsabilités et réparations

 

Article 4. L’utilisation d’armes de destruction massive par l’Espagne contre le Rif et les rifains à eu pour conséquence un grave préjudice subit par les victimes d’hier et qui se poursuit aujourd’hui encore auprès des héritiers de ces victimes, compte tenu du caractère cancérigène et mutagène des armes chimiques utilisées. En conséquence, l’Espagne autant que la France d’aujourd’hui doivent reconnaîtrent les responsabilité des Etats espagnol et français d’alors et réparer les préjudices subits par le Rif et les rifains.

 

Article 5. Le gouvernement marocain usera de tous les moyens de droit en engageant les procédures appropriées auprès des tribunaux compétents espagnols et français, voire la Cour européenne des droits de l’homme, la Cour internationale de justice et toutes autres institutions internationales compétentes afin d’engager la responsabilité des Etats français et espagnol, ainsi que la responsabilité des sociétés SCHNEIDER et STOLZENBERG, outre les responsabilités individuelles des personnes.

 

Titre 3

Création d’une fondation ad hoc et soutien à

 la réparation des préjudices subits

 

Article 6. Il est crée une fondation ad hoc chargée de l’étude, de l’évaluation, de la réparation et de toutes autres actions et mesures en relation avec les préjudices subies par le Rif et les rifains, comme conséquence de la guerre chimique contre le Grand Rif. Les statuts de cette fondation seront validés par le parlement.

 

Article 7. La chambre des députés, la chambre des conseillers ainsi que le gouvernement apporteront tout leurs concours et soutien à la question de la réparation des préjudices consécutifs à la guerre chimique contre le Rif, ainsi qu’aux chercheurs et ONG, en inscrivant le problème de la guerre chimique contre le Grand Rif parmi leurs priorités.

 

Article 8. Le parlement organisera un colloque international d’information et de débat autour de la question de la guerre chimique contre le Rif.


07/06/2010
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TEXTE PUBLIE AU BULLETIN OFFICIEL ESPAGNOL SUR LA GUERRE CHIMIQUE CONTRE LE RIF

VIII LEGISLATURA
Serie D:
7 de septiembre de 2005 Núm. 255
GENERAL


BOLETÍN OFICIAL
DE LAS CORTES GENERALES
Control de la acción del Gobierno


Proposiciones no de Ley
Comisión Constitucional
161/001169 Proposición no de Ley presentada por el Grupo Parlamentario de Esquerra Republicana (ERC), de reconocimiento de responsabilidades y reparación de daños como consecuencia del uso de armamento químico en el Rif .....................................................................................................................5

Comisión Constitucional
161/001169


A la Mesa del Congreso de los Diputados El Grupo Parlamentario de Esquerra Republicana, a instancia del Diputado don Joan Tardà i Coma y de la Diputada Rosa María Bonás i Pahisa, al amparo de lo dispuesto en el artículo 193 y siguientes del vigente Reglamento de la Cámara, presenta la siguiente Proposición no de Ley de reconocimiento de responsabilidades del Estado español y reparación de daños consecuencia del uso de armamento químico en el Rif, para su debate en Comisión.


Exposición de motivos
El Estado español desde comienzo del siglo xx protagonizó una guerra de agresión contra la población rifeña sin distinción de su carácter militar o civil, utilizando sistemáticamente desde el año 1921, a manera de venganza por el desastre de Annual, armas no convencionales, prohibidas en virtud de las Convenciones de La Haya de 1899 y 1907, y ratificadas en 1919 en Versalles.
Es más, en 1925, en plena ofensiva militar con armamento químico, España, que había suscrito lo acordado en Versalles, se adhirió al protocolo de Ginebra sobre la prohibición de armas químicas y bacteriológicas.
En lo últimos años, estudiosos españoles dedicados a la investigación histórica, como Juan Pando, María Rosa de Madariaga, Carlos Lázaro y Ángel Viñas, utilizando las fuentes documentales de los archivos militares españoles, han confirmado el empleo de dichas armas por parte del ejército español en el norte de Marruecos durante el período comprendido entre los años 1921 y 1927 con la voluntad de acabar con el movimiento independentista rifeño acaudillado por Abd el Krim.
Las conclusiones de estos estudios ya habían sido avanzadas por los investigadores alemanes Rudibert Kunz y Rolf-Dieter Müller en su obra «Giftgas gegen Abd el Krim. Deutschland, Spanien und der Gaskrieg in Spanisch-Marokko 1922-1927» («Gas venenoso contra Abdelkrim. Alemania, España y la Guerra del gas en el Marruecos español»), editado en Freiburg en 1990. Estudios, por otro lado, subrayados por el historiador británico Sebastian Balfour de la London School
of Economics, en la obra «Abrazo Mortal. De la guerra colonial a la Guerra Civil en España y Marruecos (1909-1939)», editado en Barcelona en el año 2002. Este último, incluso llegó a entrevistar a supervivientes, como Mohamed Farabi, que recuerda muy bien esas bombas llamadas «arhay», es decir «veneno» en el idioma bereber, lanzadas desde aviones sobre los pueblos del Rif.
Los oficiales del ejército españoles llamaban a esas armas químicas «bombas X» o «bombas especiales», producidas con distintos materiales como fosgeno, difosgeno, cliopicrina y, sobre todo, yperita, conocida también bajo el nombre de gas mostaza. Las cantidades utilizadas son difícilmente calculables. Si bien los investigadores alemanes barajan un almacenamiento de más de 400 toneladas, la historiadora María Rosa Madariaga afirma que «para saber exactamente cuántas bombas tóxicas se arrojaron habría que consultar, uno a uno minuciosamente en el Archivo General Militar de Madrid, todos los partes de lanzamiento de bombas por la artillería y la aviación desde 1923 a 1927».
El primer ataque químico realizado por medio de piezas de artillería se hizo en noviembre de 1921 con fosgeno, pero se utilizó masivamente a partir de julio de 1923 durante la batalla de Tizi Azza del territorio de los Asht Tuzin. El historiador británico Balfour, en su minuciosa investigación y de consulta de los archivos militares, confirma que estas armas prohibidas de destrucción masiva se emplearon mediante ataques aéreos en las áreas más pobladas y en los momentos del día de mayor aglomeración, como los zocos semanales (mercados comerciales tribales que tenían lugar un día a la semana) con la finalidad de provocar el mayor daño posible en la población civil. En palabra del mariscal Louis-Hubert Lyautey, primera autoridad en el Marruecos francés, los bombardeos desde los aviones españoles «han dañado gravemente los pueblos rebeldes, usando con frecuencia bombas de gas lacrimógeno y asfixiantes que causaban estragos entre la pacífica población...», lo cual provocó que «... gran número de mujeres y niños acudieran a Tánger para recibir tratamiento médico».
Otros testimonios avalan la veracidad de los terribles hechos: H. Pughe Lloyd, un oficial británico, remitió un despacho, fechado en enero de 1926, a su Ministro de Guerra en el que en referencia a las víctimas de los bombardeos se decía: «Muchos de ellos murieron y gran número se entregaron en sectores no tan belicosos con la esperanza de recibir tratamiento. Sobre todo estaban medio ciegos y tenían muy afectados los pulmones».
Dicha estrategia militar estaba avalada por el propio Rey de España Alfonso XIII, quien en diversas ocasiones manifestó su interés por las armas químicas. Hoy día, la obra publicada permite conocer parte de sus opiniones y opciones, como la conversación telegrafiada con el alto comisario del territorio en la que se lamentaba de que «no te hayamos podido mandar una escuadra de bombardeo, para con gases llevar la desolación al campo rifeño y hacerle sentir nuestra fuerza, rápidamente y en su territorio». O bien, cuando afirmaba en audiencia concedida
al agregado militar francés en Madrid que «lo importante es exterminar, como se hace con las malas bestias, a los Bani Urriagel (la tribu del Rif central de la provincia de Alhoceimas a la que pertenecía el líder rifeño Abd el krim) y a las tribus más próximas a Abd el krim», dejando de lado las consideraciones humanas hasta tal punto que las autoridades coloniales prohibieron la intervención de la Cruz Roja en este conflicto para dar auxilio a las poblaciones civiles.
El mencionado armamento, en una primera etapa, fue adquirido en otros Estados, prioritariamente en Alemania. No obstante, de inmediato se procedió a la instalación de dependencias industriales capaces de producirlo. En concreto, en dos centros, uno de ellos ubicado en Melilla, y el otro, gracias a un acuerdo firmado en el Estado alemán en 1923, instalado en La Marañosa, bajo el nombre de Fábrica Nacional de La Marañosa, pero conocida popularmente con el nombre de la «fábrica de Alfonso XIII», dado el apoyo decidido de este monarca al uso de las armas químicas. Dichas armas químicas, prohibidas por el derecho
internacional, tuvieron consecuencias desastrosas: ceguera, llagas, problemas respiratorios y cánceres.
Estos perjuicios todavía hoy día son perceptibles por los descendientes por razón del carácter cancerígeno y mutágeno de dichas armas. Efectivamente, el Rif, el único territorio donde se emplearon estos gases tóxicos, en la actualidad la región con mayor índice de enfermos de tumores cancerígenos en todo Marruecos. Considerando que el uso de las armas químicas por
parte de España en contra del Rif y en contra de sus habitantes constituye un Crimen contra la Humanidad que no ha sido reparado, que el recuerdo de tal afrenta se ha mantenido vivo hasta hoy día en la memoria histórica del pueblo rifeño, pudiendo incluso plantearse objetivamente la constatación de los graves daños ocasionados morales, económicos y sanitarios a los contemporáneos de los ataques y a sus descendientes, y en aras de reparar a los damnificados y de reconciliar los pueblos que un día se vieron enfrentados en una guerra colonial dirigida por un ejército expansionista y un régimen monárquico que amparó un régimen dictatorial.
   - Considerando que la sociedad española actual goza de suficiente madurez y cultura democráticas como para proceder a reconocer unos hechos deliberadamente olvidados, condición imprescindible para poder llevar a cabo una verdadera y sincera revisión de su historia con la finalidad de fortalecer los valores democráticos de las nuevas generaciones.
    - Considerando necesario enaltecer y comprometer, hoy más que nunca, las acciones de los demócratas a favor de la solidaridad internacional y la fraternidad entre los pueblos.
                                                                 Proposición no de ley
«El Congreso de los Diputados insta al Gobierno español a:
1. Reconocer la responsabilidad del Estado español por las acciones militares llevadas a cabo por el ejército español en contra de la población civil del Rif por orden de su máxima autoridad, el rey Alfonso XIII, durante los años 1922-1927.
2. Comprometer la organización y celebración de actos de reconciliación, de fraternidad y de solidaridad para con las víctimas, sus descendientes y el conjunto de la ciudadanía rifeña, como forma de expresar la petición de perdón por parte del Estado español.
3. Facilitar la obra investigadora de los historiadores y de todos aquellos interesados en profundizar en el conocimiento de los hechos históricos mediante la adecuación de los archivos militares a los protocolos que rigen hoy día la archivística actual.
4. Proceder a la revisión de las anotaciones, referencias y capítulos relativos a las campañas militares llevadas a cabo por el ejército español, contenidas en museos, monumentos, cuarteles militares, libros de texto, manuales militares, etc., que oculten el uso de armamento químico y/o tergiversen la veracidad histórica.
5. Apoyar a aquellas asociaciones culturales, académicas y científicas españolas y marroquíes dedicadas a la labor de investigación de los efectos y consecuencias del empleo de armamento químico en el Rif.
6. Asumir las posibles compensaciones económicas de carácter individual que pudieran reclamarse por los daños causados.
7. Contribuir, en el marco de la cooperación hispano-marroquí, a la reparación de los daños colectivos y a la compensación de la deuda histórica a través de una activación e incremento de los planes de cooperación económica y social dirigidos al conjunto del territorio del Rif y, en especial, a las provincias de Nador y Alhucemas.
8. Dotar los hospitales del Rif, y en especial los de las provincias de Nador y Alhucemas, de unidades sanitarias especializadas en el tratamiento oncológico, que contribuyan a aminorar los altos porcentajes de enfermedades cancerígenas.»


Palacio del Congreso de los Diputados, 28 de julio
de 2005.—Rosa María Bonàs i Pahisa, Diputa-
da.—Joan Tardà i Coma, Portavoz del Grupo Parlamentario
de Esquerra Republicana (ERC).


20/05/2010
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POUR DES REVENDICATIONS, AUX FINS DE REPARATIONS, POUR LES PREJUDICES SUBIS SUITE A L’UTILISATION D’ARMES CHIMIQUES DE DESTRUCTIONS MASSIVES DANS LE RIF

POUR DES REVENDICATIONS, AUX FINS DE REPARATIONS,  POUR LES PREJUDICES SUBIS  SUITE A L’UTILISATION D’ARMES CHIMIQUES DE DESTRUCTIONS MASSIVES DANS LE RIF[1]*.

 

Avant tout, je souhaite exprimer mes vifs remerciements à tous ceux et toutes celles qui ont contribués, d’une façon ou d’une autre, à cette rencontre. Et je saisi cette occasion pour témoigner de toute ma sympathie à nos amis, frères et parents espagnols ici dignement représentés par le professeur Maria Rosa De Madariaga.

 

Auprès de la « communauté internationale », le fait de posséder ou même d’avoir un programme d’armes chimiques ou biologiques de destruction massive est devenu un véritable spectre. A tel point que d’aucuns n’hésitent pas à agir de façon préventive comme tout un chacun a pu le voir avec les opérations militaires menées contre l’Irak. C’est dire combien ce qui touche aux armes de destruction massive peut être grave.

 

La question des armes de destruction massive est, aujourd’hui, fort d’actualité. Néanmoins, cela ne signifie nullement que le monde vient tout juste de découvrir les dangers et risques attenants à l’utilisation des armes chimiques. Déjà, au début du 20ème siècle, le Rif en a connu les affres. Aussi, est-il plus que légitime de rechercher réparation morale et matérielle pour le Rif et les rifains. Mais auparavant, il convient de rappeler ce qui s’est passé.

 

I. Rappels

Durant la guerre du Rif, l’Etat espagnol a fait usage d’armes chimiques de destruction massive[2] contre les populations rifaines. L’utilisation de ces armes chimiques était et demeure prohibée par les conventions internationales sur le droit de la guerre[3]. Différents documents et références reproduits par plusieurs auteurs et chercheurs, dans des travaux et publications divers, ont pu mettre en exergue le type d’armes chimiques, à base d’ypérite[4], de phosgène ou de chloropicrine, utilisées ainsi que leurs effets sur la population, les animaux et les plantes.

 

Les témoignages de ceux qui ont pu le vivre, directement ou indirectement, en temps que victimes ou en tant qu’agresseurs, ou instruments de l’agression, les opinions des experts, les publications d’écrivains, d’historiens et chercheurs sont  accablants. A l’époque, dans l’immédiat, le résultat en était la mort ou l’aveuglement des être vivants outre une végétation brûlée. Mais la question qui se pose est de savoir ce qu’il en est ensuite ? Après coup, est ce qu’il y a des effets néfastes consécutifs à l’emploi de ces armes chimiques[5] ? Ou pas ?

 

Si l’Etat espagnol se trouve être directement impliqué pour avoir illégalement utilisé des armes de destruction massive, prohibées par le droit international, notamment, contre des populations civiles démunies, il n’en reste pas moins que la responsabilité de l’Etat français, de l’époque, n’est pas en reste en tant que complice et partenaire de l’Etat espagnol, dans un premier temps, puis en tant qu’ayant lui même fait usage d’armes chimiques de destruction massive, dans la région de Fès, en 1925. De même que la responsabilité de l’entreprise allemande et de celle française ayant participées à la production et à la vente de ces armes chimiques.

 

L’utilisation de ces armes chimiques de destruction massive a eu pour résultat de nombreuses victimes, [les cibles principales étant les marchés], la reddition de Mohamed Abdelkrim El Khattabi et, par suite, la fin de la guerre du Rif.

 

Force est de noter qu’à ce jour aucune voix ne s’est élevé pour dénoncer et condamner officiellement ce qui s’est passé au début du siècle dernier.

 

Pire, l’utilisation de ces armes chimiques semble d’actualité en raison de la relation de cause à effet entre ces mêmes armes de destruction massive et des maladies diverses telles que les cancers du larynx dont sont atteint les habitants de la région du Rif. Les statistiques des hôpitaux marocains attestent que le taux de certains cancers atteint un pic alarmant dans la région du Rif. Ce taux est sans commune mesure avec les autres régions. Quelle peut dès lors en être la raison ? La raison mise en évidence par l’histoire et les experts est précisément l’utilisation de ces armes chimiques de destruction massive. En ce qui concerne l’ypérite, divers rapports et études faits par des scientifiques de renommée internationale, [que l’on retrouve sur Internet], affirment, notamment, les effets cancérigènes et mutagènes de cette même ypérite[6].

 

Aujourd’hui, si d’aucuns s’accordent  à reconnaître, car on ne peut nier les faits et évidences, que l’utilisation des armes chimiques de destruction massive sur le Rif et sa population a bien eu lieu, toujours est-il que certains :

          - s’efforcent de minimiser sans grande conviction l’impact de ces utilisations ;

          -  essayent de soutenir que la science ne peut pas affirmer la relation de cause à effet entre l’utilisation de ces armes chimiques de destruction massive et le fort taux de cancers dans le Rif ;

          - voire même s’interrogent sur l’intérêt d’un colloque sur le thème en question.

 

Les scientifiques et autres historiens ne sont pas toujours neutres. Loin s’en faut. Et la science elle même n’a jamais été neutre. Pour ce qui nous concerne, il est des faits. Des faits avérés et certains : L’utilisation d’armes chimiques de destruction massive contre des populations sans distinction aucune de leur caractère civil ou militaire, hommes ou femmes, adultes, vieillards ou enfants,… contre des animaux, contre la végétation,…

 

L’impact immédiat et à court terme a été terrible, désastreux, inhumain, catastrophique, apocalyptique,… Ainsi, un certain nombre de question se posent :

         -  Comment évaluer les dégâts causés ? Comment évaluer les préjudices en pertes humaines, animales, matérielles et végétales subies ? Quel est le nombre de personnes victimes directes ou indirectes de l’utilisation des armes chimiques de destruction massive contre le Rif ?

          - Comment évaluer le préjudice subit dans le temps et dans l’espace par le Rif et les rifains ?

 

Des populations de paysans libres se sont retrouvées agressées, envahies, anéanties, gazées jusqu’au plus profond de leurs chaires et de leurs êtres, par deux superpuissances européennes au fait de la technologie militaire et sur- armées.

 

Officiellement, aucune reconnaissance de la responsabilité des différentes parties en cause n’a jamais été admise, à ce jour. Pourtant, les faits sont là. L’Espagne, la France et leurs complices ont commis une faute en violation des obligations découlant du droit international et de cette faute est résulté un préjudice historique qui se poursuit encore aujourd’hui dans la chaire des héritiers des rifains d’hier.

 

Aujourd’hui, le Rif et ses populations demeurent une région pauvre, enclavée et délaissée. Sans infrastructure, sans hôpitaux, sans industrie ni économie viable, … Les personnes atteintes de cancers doivent se déplacer jusqu’à Rabat pour pouvoir suivre des soins, avec tout ce que cela suppose comme contraintes et quand elles peuvent se le permettre.

 

 Le moins que l’Espagne, la France et leurs complices d’hier peuvent faire c’est d’exprimer une bonne foi présente :

         - En reconnaissant moralement la responsabilité historique, politique et juridique de l’Etat espagnol et de l’Etat français d’antan ;

         - En participant à l’évaluation des préjudices subis ;

        -  En procédant à réparation, dommages et intérêts vis-à-vis du Rif et de ses populations.

 

 II. Projet de plan d’action

L’action en vue de cette reconnaissance et aux fins de réparations peut théoriquement intervenir selon trois axes : à l’amiable, par voie judiciaire et de façon médiatisée.

 

 1. Une action médiatique

Dans tous les cas, les actions en revendication doivent être appuyées par une forte campagne médiatique de communication auprès des médias nationaux et internationaux ainsi que par Internet. La création d’un site Web avec un appel à signatures pour condamnation de l’emploi d’armes chimiques de destruction massive dans le Rif ainsi qu’une adresse email pour toutes ces actions est fort indiquée. Il faudrait, probablement, tisser un réseau de personnes ressources d’appui et de relais, à l’échelle nationale et internationale.

 

2. Le choix d’une action amiable pour obtenir reconnaissance et réparation

A priori, une solution amiable pour obtenir reconnaissance de responsabilité et réparation serait la voie même de la sagesse. Néanmoins, tout porte à croire qu’une telle éventualité ne risque pas de recueillir facilement assentiment de la part des concernés.

 

 2.1. Qui devrait agir ?

Dans la perspective d’une action amiable, qui aurait qualité du point de vue juridique pour discuter, au nom du Rif et de sa population une telle solution ?

           - L’Etat marocain ? Ce dernier ne semble pas, à priori, intéressé par une telle éventualité !

            -  L’association des victimes de la guerre chimique dans le Rif ? Cela est théoriquement possible. [Pour cela, cette association devrait recevoir mandat, en ce sens, par des victimes ou héritiers de victimes].

            -  La fondation Mohamed Abdelkrim El Khattabi ?

            - Une autre entité ad hoc crée pour la circonstance ?

Au préalable, il convient de se demander ce que l’on souhaite exactement. Au nom de qui ? Pour qui ? Comment ?

 

 2.2. Qui saisir ?

Il faudrait s’adresser à ceux qui devraient reconnaître leurs responsabilités et réparer. En l’occurrence, l’Etat espagnol, l’Etat français, le congrès espagnol, l’armée espagnole, l’entreprise allemande concernée, [Stolzenberg], l’entreprise française [Schneider],…

 

Bien que cette hypothèse d’une solution amiable ne semble pas avoir beaucoup de chances de succès, toujours est-il que pour des considérations de forme, il est indiqué que des correspondances soient engagées en ce sens.

 

3. Le choix d’une action judiciaire pour obtenir reconnaissance et réparation

Faudrait-il engager une action devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme, afin de demander et obtenir réparation ? Cette institution présente des intérêts pour avoir réparation, dommage et intérêts. Toujours est-il que pour que cette institution soit compétente, il faut au préalable avoir épuisé les voies de recours préliminaires. En conséquence, il faudrait saisir les tribunaux espagnols et/ou français et à défaut d’avoir et obtenir gain de cause la voie serait dès lors ouverte pour la Cour Européenne des droits de l’homme.

 

3.1. La saisine des tribunaux espagnols et/ou français

Peu importe qu’il s’agisse des tribunaux espagnols ou français. Néanmoins, le choix de la ville peut quant à lui être important. Il faudrait également voir parmi les militants le choix de l’avocat qui serait chargé du dépôt de la requête. A ce sujet diverses questions se posent :

 

             1. Contre qui intenter ces actions ?

L’Etat espagnol - l’Etat français - le congrès espagnol - l’armée espagnole - l’entreprise allemande concernée, [Stolzenberg], l’entreprise française [Schneider],…

 

             2. Qu’en est-il de la préparation du dossier ?

En quoi doit consister le dossier ? Outre la requête proprement dite, le dossier juridique avec ses arguments doit comporter les documents techniques suivants : Publications sélectives en relation avec la guerre chimique sur le Rif – Dossiers médicaux de personnes victimes de la guerre – Rapports d’experts – Mandats de victimes ou d’héritiers de victimes     – Dossier sur la situation économique et sociale dans le Rif – Sort de la région et de la population sur le plan médical, sur le plan des infrastructures, du niveau de vie, de la santé, …

 

             3. Qu’en est-il des témoins ?

Hormis les experts, la question est de savoir s’il y a il encore des témoins vivants parmi ceux qui ont participé à la guerre chimique contre le Rif ? Et s’il y a encore des témoins vivants parmi ceux qui ont subi la guerre chimique contre le Rif ?

 

            4. Qu’en est-il de l’objet de la plainte ?

L’objet de la plainte serait :

              - Obtenir par voie judiciaire devant les tribunaux reconnaissance des crimes historiques et politiques contre l’humanité commis en violation des règles élémentaires du droit international et des droits humains, en raison de l’utilisation d’armes chimiques de destruction massive dans le Rif.

             - Obtenir évaluation et confirmation des dommages et préjudices subis individuellement et collectivement par les rifains d’hier, d’aujourd’hui et de demain.

            - Obtenir réparation morale et matérielle pour les dommages et intérêts pour les préjudices subis.

 

 3.2. La saisine de la Cour Européenne des droits de l’homme.

Dans le cas ou les différentes actions préliminaires, offertes par les voies de recours internes, espagnoles et/ou françaises, ne donneraient pas gain de cause, la voie royale serait dès lors ouverte pour la compétence de la Cour Européenne des Droits de l’homme. Cette dernière n’est compétente que pour autant que les voies de recours internes sont épuisées et que le demandeur n’ait pas pu obtenir réparation. La procédure devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme est des plus aisées et la tradition de cette Cour, au regard de sa jurisprudence, permet d’être confiante dans la justesse de ses décisions.

 

Copyright Mimoun CHARQI

                                                                                 

 

 



[1] Communication faite au colloque international organisé par le journal « le monde amazigh » à Nador, le 14 février 2004, sur « L’utilisation des armes chimiques entre hier et aujourd’hui : le cas de la guerre du Rif et ses conséquences ».

 [2] D’aucuns pourront gloser et polémiquer sur l’emploi du terme « massif », en arguant que l’utilisation des armes chimiques contre le Rif n’aurait pas été massive. Mais à partir de quel moment il y a lieu de parler correctement d’emploi massif d’armes chimiques ? Compte tenu des moyens de l’époque, ce qui a été mis en place et utilisé ne peut être qualifié que de « massif ». D’autant plus que, par définition, les armes chimiques dont-il s’agit ici sont des armes chimiques de destructions massives.

[3] Notamment, la Convention de Strasbourg entre le France et la Prusse (1675), la Déclaration de Bruxelles entre plusieurs pays d’Europe (1874), (signée mais non ratifiée), la Convention de la conférence internationale de la Haye (1899), le traité de Versailles (1919) et surtout le Protocole de Genève (1925), la Convention de 1972 et la Convention de 1993.

[4] Au sujet de l’ypérite ou gaz moutarde, le bureau de la non prolifération, du département d’Etat américain, écrit qu’il s’agit d’un « agent liquide qui émet une vapeur nocive causant des brûlures et des cloques lorsqu’elle est en contact avec la peau. Lorsqu’elle est respirée, l’ypérite endommage les voies respiratoires ; ingérée, elle cause vomissements et diarrhée. Elle attaque et endommage les yeux, les muqueuses, les poumons, la peau et l’appareil sanguin. (…) ; Ses effets à long terme les plus graves sont dus au fait que, sous forme de gaz, elle est cancérigène et mutagène. Il n’existe pas d’antidote contre l’ypérite ». C’est nous qui soulignons. Voir Service d’information du département d’Etat des Etats Unis. http://usinfo.state.gov/français/pubs/irak/weapons.htm Voir églt., Armes chimiques Agents vésicants (Ypérite). http://membres.lycos.fr/armch/agentsvesicants.html ? Sur les mutations géniques et le caractère mutagène, Jérôme LEJEUNE et Raymond TURPIN écrivent : « Ces mutations invisibles avec les techniques actuelles et n’interférant pas avec la mécanique méiotique sont à l’origine de la plupart des maladies héréditaires connues chez l’homme ». « (…), il n’est pas inutile de rappeler que de nombreuses substances chimiques sont elles aussi mutagènes. Il n’est d’ailleurs nullement impossible que ces mutagènes chimiques jouent dès maintenant un rôle dans notre espèce, bien qu’on ne l’ait pas encore mis en évidence.

Depuis 1942 et la découverte par Auerbach et Robson de l’activité mutagène du gaz moutarde ou « ypérite », la liste des agents radiomimétiques n’a cessé de s’accroître. (…) ». In : Les effets génétiques des rayonnements ionisants. Luigi GEDDA. « De genetica medica » - Pars III ; Edizioni dell’istituto « gregorio mendel » - Roma 1961. Pages 10 et 11. http://www.fondationlejeune.org/Content/hercher/Do…

[5] Le fait que, quelque part, des experts affirment que l’état de la science, actuellement, ne permet pas d’affirmer qu’une relation de cause à effet puisse être établie entre l’utilisation des armes chimiques contre le Rif et les cancers dont sont atteints les personnes de la région plusieurs décennies plus tard n’est pas la preuve de l’absence de cette relation. Il sied également de rappeler les Etats ont souvent refusé de reconnaître les effets néfastes des armes sur la santé des personnes. Faisant suite aux bombardement effectués sur Halabja, en 1998, le Dr Christine GOSDEN, professeur à l’université de Liverpool, écrit, en 1998, [dans un rapport pour l’Institut de recherches sur le désarmement des Nations Unies], avoir relevé « des cas de cancers rares, des malformations chez les enfants, de fausses couches, d’infections pulmonaires récurrentes et de problèmes neuro-psychiatriques graves. Le gaz moutarde (ypérite) a brûlé des cornées, provoquant des cécités. Des cancers risquent de n’apparaître que cinq à dix années après l’exposition ». Voir Fred PEARCE. Guerre et environnement : réactions en chaîne. Le Courrier. Unesco. Mai 2000.

http://www.unesco.org/courrier/2000_05/fr/planet.htm

[6] Voir supra note 3.


19/05/2010
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LA GUERRE CHIMIQUE ET LE RIF ENTRE LE DROIT INTERNATIONAL ET LES DROITS DE L'HOMME

[Quel rapport entre les droits de l’homme et

la question de la guerre chimique contre le Rif ?]

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D’amblée, on peut affirmer que le droit international a fait l’objet de violations lors de l’utilisation des ACDM contre le Rif, au moment du soi disant « protectorat ». Mais depuis l’indépendance politique du pays, quant est-il du respect du droit international des droits de l’homme et du droit au développement ?

I. La guerre chimique contre le Rif est un crime contre l’humanité

Il est indéniable qu’à travers la guerre chimique contre le Rif, il y a eu une violation caractérisée des préceptes essentiels du droit international public et du droit international humanitaire. Il s’agit d’un crime contre l’humanité, doublé d’un génocide exercé contre un peuple libre de paysans. Par définition, les crimes contre l’humanité sont des crimes imprescriptibles. De surcroît, les héritiers des victimes d’hier continus de souffrir aujourd’hui même des séquelles engendrées par l’utilisation des ACDM qui selon les experts reconnus se trouvent avoir des effets cancérigènes et mutagènes.

1. Le contenu du droit international public

Le droit international public comporte un ensemble de principes et règles parmi lesquelles celles qu’on appelle de jus cogens. Ces règles de jus cogens sont des règles dites « impératives ». C'est-à-dire qu’il ne peut y être dérogé. On retrouve dans ces règles impératives : le principe du droit des peuples à disposer d’eux –mêmes, le principe de la non agression dans les relations internationales, celui du recours aux voies pacifiques pour le règlement des litiges, le principe de la souveraineté des Etats, etc.

2. L’interdiction des ACDM

Déjà à la fin du 19e siècle, la première conférence de la Haye, du 29 juillet 1899, signée entre nations européennes, interdit l’emploi de projectiles ayant pour but de répandre des gaz asphyxiants ou délétères. Le Traité de Versailles du 28 juin 1919, prévoit également la prohibition des armes chimiques de destruction massive. Le Traité de Washington du 6 février 1922 mentionne ces interdictions à son article 5. Le protocole de Genève, du 17 juin 1925, interdit quant à lui les gaz asphyxiants, toxiques ou similaires,… Ces interdictions ont étés confirmées et développées par la suite par divers autres instruments internationaux. 

Ainsi, le droit international à partir de la fin de la première guerre mondiale a interdit l’usage de certaines armes dites non conventionnelles. Il en est ainsi des armes chimiques et biologiques de destruction massive.

Du point de vue légal, la production, la vente, l’utilisation ou même le stockage des armes chimiques de destruction massive sont strictement prohibés par le droit international public.

3. Les responsables de l’utilisation des ACDM contre le Rif

Pourtant, cela n’a pas empêché l’Espagne et la France de violer, à ce jour impunément, ces interdictions en faisant usage d’une guerre chimique d’agression contre le Rif et ses populations. Outre celles des Etats français et espagnol, la responsabilité de la société française Schneider S.A, [depuis Schneider electric] et de la société allemande Stolzenberg pourrait être retenue.

4. L’évolution et l’élargissement du droit international

Au début du 20e siècle, le monde est encore fait de puissances colonisatrices et de pays colonisés. Le droit international et les grands principes qu’il véhicule, encore appelé « droit des gens » ou « jus gentium » ne s’applique qu’entre nations dites « civilisées ». Le droit international ainsi fait n’a rien d’un droit naturel auquel peuvent prétendrent tous les peuples de la terre. Il est fait sur la base du consentement, de l’accord des Etats. Toujours est-il que les Etats colonisés vont se servir des principes du droit international public pour réclamer leurs décolonisations et indépendances.

Les systèmes et ordres juridiques sont assez complexes : on y retrouve le système du moment, les séquelles du passé et les embryons du système à venir. Les violations et atteintes aux grands principes du droit international ne remettent pas en cause le bien fondé et la justesse de ce dernier. L’ordre juridique international ne cesse de bouger. Les puissants et tyrans d’hier ou d’aujourd’hui ont de fortes chances de se voir rattraper par l’histoire et le droit.

5. L’actualité des ACDM

Aujourd’hui, chacun a pu suivre les arguments soulevés par les Etats-Unis et leurs alliés pour légitimer leurs interventions en Irak et ailleurs. Pour raison d’ACDM et à titre préventif la coalition américaine n’hésite pas à intervenir militairement. Le président irakien déchu se voit reprocher d’avoir utilisé contre une partie du peuple Irakien, en l’occurrence le peuple Kurde, des ACDM. Or, il se trouve, comme vous le savez, que l’histoire rend compte de ce que dans notre pays, dans le Rif, lors de la guerre de libération menée par Mohamed Abdelkrim El Khattabi, il a été fait usage d’ACDM. Longtemps durant des euphémismes ont été utilisés pour désigner ces armes : gaz toxiques, bombes X, bombes spéciales,… Ce dont il s’agit porte le nom d’Ypérite (gaz moutarde), phosgène et chloropicrine. Et la qualification qui se fait aujourd’hui de ces armes est ACDM.

II. La marginalisation du Rif est une violation du droit international des droits de l’homme

Le désintérêt manifeste de l’Etat nation marocain, nouvellement indépendant, pour le Rif est sans doute une violation du droit international des doits de l’homme et du droit au développement.

1. Le désintérêt de l’Etat marocain pour l’affaire de l’utilisation des ACDM contre le Rif

De prime abord, il convient de rendre compte de ce que le respect des droits de la personne humaine n’est pas garanti et assuré partout de la même façon. Les ressortissants des différents Etats ne bénéficient pas égalitairement de la même protection de leurs Etats nationaux. Les Etats développés ayant une tradition de droit en ce qui concerne leurs ressortissants n’hésitent pas à prendre fait et cause pour leur nationaux et leur assurer protection. Bien malheureusement, cela n’est pas le cas dans notre pays. L’Etat marocain aurait pu faire usage de la protection diplomatique pour défendre juridiquement les droits et intérêts de ses ressortissants dans le Rif, en endossant l’affaire de la guerre chimique et en saisissant la Cour internationale de justice. [Force est de noter que seul un Etat peut saisir la Cour internationale de justice].

2. Le non respect du principe de l’égalité entre les citoyens

Lorsqu’on examine ce que sont les grands principes figurant dans la loi fondamentale du Maroc, on se rend compte que l’égalité des citoyens est en bonne place. Pourtant, le principe de réalité permet de se rendre compte que le Rif ainsi que ses populations ont  été loin de bénéficier de la même attention que les régions et populations du Centre ou même du Sud et du Sahara. Le ressentiment en est d’ailleurs profondément ressenti par les populations.

3. Le cinquantenaire de l’abandon du Grand Rif

Le Grand Rif a pour ainsi dire été laissé à l’abandon. Les programmes de développement, les infrastructures de bases à même de permettre un décollage de la région et une mise à niveau de ses populations n’ont jamais été amorcées. Ce n’est que 50 ans après l’indépendance politique du pays que le débat voit le jour. Comme suite au tremblement de terre d’Al Hoceima, les projecteurs se sont tournés vers le Rif, ce dernier est devenu à l’ordre du jour, au point que l’on s’attendait, après le discours du Souverain, que le Rif allait devenir la priorité. Pourtant, il s’est avéré une fois de plus qu’une priorité ne dure que le temps d’être chassée par une autre priorité. Il a été réclamé un plan d’action précis, un programme quantifié en vain.

4. Le développement de l’autonomie des régions

Le premier des droits de l’homme est, selon le droit international même, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Les décolonisations n’ont pas toujours, bien s’en faut, conduit à l’exercice du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Dans le cas du Sahara, anciennement colonisé par l’Espagne, et afin de régler les problèmes en relation avec ce dossier, le Maroc, fort bien inspiré, envisage la mise en  place d’une large autonomie en faveur du Sahara et de ses populations. La mise en place de la régionalisation ou autonomie des régions est un instrument juridique et politique à même d’être un levier pour le développement.

Force est de rappeler que le droit au développement fait partie des droits de l’homme. L’autonomie peut être une solution aux difficultés du Rif et afin de permettre de sortir de l’exclusion, de la marginalisation et du sous développement. Car, il faut se rendre à l’évidence que le pouvoir central et centralisé a failli dans ce que devait être sa mission à l’égard de certaines régions dont le Rif. Par ailleurs, il est important de noter que toute politique de développement devrait profiter avant tout aux populations locales. Ce développement ne saurait être compris autrement que durable.

5. Le rôle du pouvoir  central

Le rôle que l’on était en droit d’attendre de l’Etat centralisé c’est de programmer et exécuter les infrastructures de base à même de permettre d’enclencher le décollage économique et social. Ce que l’on appelle l’Initiative nationale pour le développement humain aurait dû être une politique de grands travaux. Le développement humain ne se fait pas par le micro crédit. Certes que ce dernier aide énormément les gens dans la précarité, mais il ne leur permet certainement pas de sortir du sous développement.

6. Le rôle de la société civile

Il faut se féliciter de l’émergence d’associations, d’un tissu associatif constitutif de la société civile dans le Rif. Le rôle moteur que la société civile peut jouer est important. Toutefois, si je puis me permettre, la société civile se doit de rester vigilante, d’éviter de sombrer dans les pièges des manipulations politiques. Les prises de positions se doivent d’être réfléchies, raisonnables, sages,… Nous nous sommes peut être physiquement loin du Rif, mais d’esprit et de cœur nous sommes très proches et suivons avec beaucoup d’intérêt et d’attention tout ce qui s’y passe.

7. Les chantiers devant retenir l’attention

Deux grands chantiers devraient retenir toute l’attention.

* Tout d’abord, le plein exercice des droits de l’homme, au sens entier du terme, qui suppose :

                - le droit au développement ;

                - le droit à la liberté d’expression ;

                - le droit à une vie digne et humaine chez soi ;

                - le droit au respect et à la dignité ;

                - Etc.

La responsabilisation des populations locales via la démocratie et l’autonomie des régions peut s’avérer donner des fruits et résultats importants si l’on en croit les expériences étrangères des pays développés.

 

* Ensuite, à titre accessoire, et dans le prolongement du libre exercice effectif et entier des droits de l’homme, transparaît le dossier de la guerre chimique contre le Rif ; ainsi que le problème de la langue.

8. Le partenariat avec la société civile espagnole

Nous avons ici, aujourd’hui parmi nous, la présence d’un militant écologiste des droits de l’homme en la personne de José Torribio Barba. Sa participation à notre rencontre est en relation avec l’utilisation des armes chimiques de destruction massive  contre le Rif, au début du siècle passé. La fameuse usine de la Maranosa, tout près de Madrid, qui avec celle de Beni Anzar avait servit à la production des ACDM utilisées dans le Rif, continue de fonctionner à ce jour avec les risques que cela suppose. Nos amis espagnols militent depuis quelques années afin de fermer cette fabrique et nous soutiennent autant que nous les soutenons dans nos combats qui finalement se rejoignent.

Considérations finales

Le combat pour avoir gain de cause est long et les chemins tortueux. Cela suppose des investissements important en temps et en moyens financiers. C’est pourquoi les appuis qu’ils soient moraux,  financiers ou autres sont importants. La présence de chacun de vous ici est déjà un soutien. Comme vous le savez, nous avions déjà tenu, ici même, à Nador, un colloque le 14 février 2004 sur le thème de la guerre chimique contre le Rif. De ce colloque il s’est dégagé un plan d’action. Depuis, les actes du colloque ont été publiés, un groupe de recherche et un comité scientifique se sont constitués. Le produit des ventes des actes du colloque participe au financement des activités de ce Groupe de recherche. L’année dernière nous avons pu conjointement avec des amis Catalans élaborer un projet non de loi qui a été publié au bulletin officiel espagnol. Le dossier semble stagner depuis. Mais cela ne nous décourage pas puisque dernièrement nous avons saisi le Tribunal permanent des peuples.

 

Copyright Mimoun CHARQI

Mode de citation. Mimoun CHARQI."La guerre chimique et le Rif, entre le droit international et les droits de l'homme". http://CHARQI.blog4ever.com

 


11/05/2010
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