- Mimoun Charqi - ANALYSE POLITIQUE ET JURIDIQUE -

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12.TAMAZGHA


L'AZAWAD ENTRE DROITS DES PEUPLES A DISPOSER D'EUX-MEMES ET INTANGIBILITE DES FRONTIERES NEES DE LA DECOLONISATION :


 

 POUR L’AUTONOMIE DE L’AZAWAD DANS LE CADRE D’UN ETAT FÉDÉRAL MALIEN[1] 

 

                                                                                               

 Le peuple de l’Azawad, ainsi que le peuple Touareg[2] font partie des peuples autochtones qui continuent de souffrir des affres de la colonisation et de la décolonisation. Durant la période de la colonisation, le peuple Touareg, réfractaire, avide d’indépendance et de liberté, habitué aux grands espaces et au nomadisme, s’est refusé à courber l’échine devant le colonialisme. Avec l’ère de la décolonisation, l’entité et le pays Touareg ont étés purement et simplement ignorés[3].

 

C’est ce qui explique que depuis la décolonisation plusieurs soulèvements[4] du peuple Touareg ont eu lieu, dont la dernière pour la libération de l’Azawad[5] de l’emprise de l’Etat malien mis en place par l’ancienne puissance occupante, en l’occurrence la France. Le soulèvement pour la libération de l’Azawad[6] provient de l’absence de démocratie et de respect envers les droits du peuple Touareg.

 

Les intérêts en présence font que l’une des parties revendique le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, tandis qu’il lui est opposé le principe de l’utis possidetis juris, ou « intégrité des frontières nées de la décolonisation ». Dès lors, comment faire que dans le respect du droit international général, il puisse y avoir une solution du problème.


Mais, auparavant il sied de savoir ce qu’il en est de la problématique. La problématique et les enjeux en cause peuvent être présentés, sous l’angle des enjeux et arguments militaires, politiques et juridiques, d’une part, et sous celui des prétentions, réclamations et solutions idoines du problème. Mais, auparavant, pour une bonne compréhension de la question, il convient de savoir ce qu’il en est des enjeux géo politiques, géo économiques et stratégiques du dessous des cartes.

 

  

I. Problématique et enjeux du dessous des cartes

 

1. La richesse du sous sol en ressources naturelles

Le sous sol de la région de l’Azawad, ainsi que celui des pays limitrophes, au demeurant encore non exploité, est fort riche en ressources naturelles. Des ressources minières, or, argent, sel, diamant, mais aussi du pétrole dans une poche souterraine qui va jusqu’au sud du Sahara oriental tenu par l’Algérie ainsi que la partie occidentale du Sahara mauritanien et qui ferait que le pétrole pourrait être pompé depuis l’Azawad... Ce qui n’est pas pour arranger les intérêts des uns et des autres. 

 

2. L’Algérie, AQMI et l’exploitation pétrolière

Les liens entre l’Algérie, AQMI et le pétrole sont étroits et déterminants. Cette assertion est mise en avant par différents analystes. Pour Acherif Ag Intakwa, « la présence d’AQMI au Mali est révélatrice à elle seule des liens entre AQMI et l’Algérie. En effet, jusqu’à récemment AQMI était présent dans la région de Tombouctou, dans les zones pétrolifères. L’objectif de leur présence était d’empêcher les explorations pétrolifères et d’autres ressources naturelles présentes dans l’Azawad. L’Algérie voit également d’un mauvais œil toute exploration car elle a en commun de nombreuses nappes pétrolifères avec l’Azawad, et une utilisation assècherait rapidement les siennes. Aussi, le no-man’s land qu’il avait instauré avait pour objectif d’écarter les visées géostratégiques de pays comme la Franceet les États-unis qui souhaitent tous occuper la base militaire d’Amashash sous le contrôle du MNLA depuis le 10 Mars »[7].


3. Le risque de contagion des velléités à l’ensemble du peuple touareg

Par ailleurs, au-delà de l’Azawad, les cartes nous montrent ce qu’est le territoire occupé par les Touaregs. Les Touaregs ont un territoire qui ne se limite pas seulement au Nord du Mali. Aussi, les revendications et velléités indépendantistes et autres des uns ne seraient pas sans donner des idées à l’ensemble des Touaregs. Surtout lorsque l’on sait les liens identitaires et communautaires profonds réunissant les amazighs, au-delà des frontières issues de l’histoire.


Ces enjeux sont mieux compris à la lecture des cartes :

 

 

 

 

 

 

 

Les réserves de pétrole de l’Azawad sont les plus prometteuses avec le bassin de Taoudenni (situé entre la Mauritanie, l’Algérie et le Mali)[8].


Au-delà de la lecture des cartes, d’aucuns considèrent que : « Le Deal avec les français et les nigériens serait de trouver un territoire aux Touaregs afin que le conflit ne s’éternise et s'internationalise avec les conséquences sécuritaires pour toute la sous région qui peine à lutter contre les sectes islamistes. Donner aux Touareg l'Azawad c'est éviter que leurs frères du nord -Niger ne viennent revendiquer l'Aïr là ou sont installés les mines d’Uranium d'Areva la société d'état française depuis 50 ans. Ainsi la France joue t'elle  ce qui s'apparente à un jeu d'équilibriste entre les ouest africains et les maghrébins en essayant de trouver une solution acceptable pour tous »[9]

 

II. Enjeux et arguments militaires, politiques et juridiques

 

1. Droits des peuples et intangibilité des frontières

En ce qui concerne les revendications du MNLA, (Mouvement national pour la libération de l’Azawad),[10] en terme de droit international, on voit s’affronter deux principes qui à priori, mais à priori seulement, paraissent comme antagoniques : le « droit des peuples à disposer d’eux-mêmes » et « le droit des peuples à l’autodétermination », d’une part, et « l’intangibilité des frontières nées de la décolonisation », connu par l’« utis possidetis juris », d’autre part, soutenu notamment par l’Union Africaine... Ce qui est sur c’est que le droit international n’encourage pas le sécession et que les droits des peuples ne s’apparentent pas toujours à l’indépendance. D’ailleurs, les indépendances se sont souvent faites au détriment des droits des peuples[11].

 

2. Armement et militarisation de la région

Depuis l’indépendance, les différentes négociations, accords et arrangements en vue d’une solution pacifique du problème de l’Azawad avec l’autorité centrale du Mali n’ont jamais aboutis. Avec la chute du régime libyen, un stock d’armes[12] (11) impressionnant a pris la route du Sahel en tombant entre les mains d’Al Qaida au Maghreb, d’Ansar Edinne, du Mujao, du Polisario, d’une part, et du MNLA de l’autre.

 

3. La particularité du MNLA par rapport aux autres organisations

La particularité du MNLA[13] c’est que ce mouvement se veut démocratique, laïc, adepte d’un islam tolérant respectueux des valeurs universelles et des standards minima de civilisation. Le but du MNLA est une société juste et égalitaire dans l’Azawad.

Tandis que ce qui est recherché par les autres organisations précitées tient à une conquête, à une islamisation salafiste jihadiste et à une maîtrise de l’ensemble du Sahel dans un premier temps, en attendant de conquérir d’autres contrées à l’échelle mondiale. Faut-il dire que le MNLA a refusé les appels du pied[14] des autres organisations précitées, qui projetteraient un regroupement y compris avec le Polisario ? Faut-il dire que le MNLA se refuse à tout compromis avec le terrorisme, les trafics de drogues, les prises d’otages ? Etc.

4. Lutte contre le terrorisme, intérêts et confusion des genres

Les observateurs et analystes s’accordent pour soutenir que longtemps durant le Mali, ou du moins les tenant du pouvoir, tiraient profit de la situation de la nébuleuse terroriste dans le Sahel. Il n’y a jamais eu une véritable volonté de lutter contre le terrorisme dans le Sahel. Les analystes s’accordent à dire aussi que les services algériens ne seraient pas non plus très orthodoxes[15] dans la relations entretenue avec Al Qaida au Maghreb islamique.

 

Ainsi, le Professeur Jeremy Keenan[16] affirme :

« Divers signes montrent les liens entre DRS et AQMI. Hattab, par exemple, vit aujourd’hui sous la protection du DRS, tandis que les relations entre ce service de renseignement et le chef actuel de l’AQMI, Abdelmalek Droukdel (alias Abou Mossab Abdelwadoud), fait l’objet de multiples supputations. Le GSPC a commencé à faire parler de lui en 2003, lorsqu’il a enlevé 32 touristes européens : 17 avaient finalement été libérés en Algérie, 14 au Mali et l’un est mort. Comme je l’ai raconté dans « Dark Sahara » (2009) et dans « Dying Sahara », cette opération, avait été conduite par le DRS, en association avec les services de renseignements américains. Elle a sans doute été le premier test de la politique de l’administration Bush mené par une unité baptisée Groupe pour les opérations proactives et préventives (GO2P). Une politique conçue pour « fabriquer » et/ou « provoquer » le terrorisme.


Amari Saifi (porteur de douze pseudonymes, surnommé « Le Para »), qui a dirigé l’opération, était un agent du DRS. Le ravisseur de Pierre Camatte, Abdelhamed Abou Zaïd, était l’adjoint du « Para » et responsable, à ce titre, de la zone malienne. Il bénéficierait de l’aide de deux hommes : Yahia Djouadi (alias Abou Amar), un vétéran de l’opération de 2003 et Mokhtar ben Mokhtar, sorte de «freelance» du DRS »[17].

 

III. Autonomie et fédéralisme contre autodétermination et Indépendance

  

Diverses approches et contacts ont eu lieu aux fins de bons offices et médiation pour un règlement du problème en rapprochant les points de vues entre le MNLA, aujourd’hui Conseil national transitoire de l’Awazad (CNTA) et le nouveau gouvernement malien.La Mauritanie, le Burkina Faso, l’Algérie et mêmela Suisse, ont offert leurs médiations. Or, il convient de noter que ces offres avaient été repoussées, dans un premier temps, par le MNLA qui souhaitait une médiation du Maroc, compte tenu de diverses raisons.


L’ensemble de l’Azawad échappe aujourd’hui au contrôle de l’État malien et la « communauté internationale » ne semble pas accorder l’importance qu’il faut pour une juste solution du problème. L’occident ne souhaite intervenir qu’à traversla CEDEAO qui au demeurant n’avait en tête, dans un premier temps, que le retour au statu quo ante.  

 

Si le MNLA s’est prononcé, dès le début, pour l’indépendance de l’Azawad[18], son autorité sur le terrain est contestée par l’alliance entre Ansar Edinne, le Mujao, AQMI,... En sus, le MNLA se doit de faire face aux autorités du Mali[19], ainsi qu’aux États dela CEDEAO, agissant pour le compte des États occidentaux dontla France.


Pourtant, l’alliance sacrée, sur la base de la sagesse, le droit, la démocratie... tient à ce que le CNTA soit l’acteur central d’un arrangement à multiples facettes :

         1. La lutte contre la nébuleuse terroriste, les prises d’otages et les trafics en tous genres ;
         2. La mise en place d’une démocratie effective, réelle et participative, dans le cadre et à travers l’autonomie de l’Azawad, dans un Etat fédéral malien ;

         3. La résorption du problème du Sahel, de l’Azawad et la sécurité pour les États de la région et au-delà. 

Ayant compris, l’intérêt de la solution de l’autonomie en tant qu’option démocratique bien plus intéressante que l’indépendance, le CNTA serait disposé à œuvrer dans cette voie[20]. A charge pour les différentes parties en présence de comprendre que le maintien du statu quo est fort préjudiciable, que la sécession et l’indépendance sont sans intérêt, tandis l’autonomie de l’Azawad dans un Etat fédéral malien est prometteuse d’avenir meilleur, pour l’ensemble des parties en présence, qui seraient convaincues de démocratie, liberté, justice et droits de l’homme. Ainsi la solution réside t-elle dans le droit à l’autonomie, selon les dispositions du projet de manifeste de Tamazgha[21], une charte pour l’ensemble des pays de la berbérie.

 



[1] Conférence livrée au Centre Amazigh d’Etudes Stratégiques, - Massinissa Institut -, à Rabat, le 08 septembre 2012.

[2] Les Touareg sont à l’origine un peuple amazigh de nomades vivant d’élevage et de commerce dans le Sahara central, avec un alphabet à savoir, le tifinagh, et une langue, le tamasheq. Aujourd’hui les Touareg représentent divers groupes, répartis sur six pays à savoir le Mali, le Niger, l’Algérie,la Libye,la Mauritanie et le Burkina Faso). La population générale est estimée à 1,5 million de Touareg, dont 550 000 vivraient au Mali et 850 000 au Niger. Voir http://www.grip.org/fr/siteweb/images/NOTES_ANALYSE/2012/NA_2012-05-22_FR_J-DUFOUR.pdf

[3] Aujourd’hui encore, selon l’ex-président malien Amadou Toumani Touré, au Mali,  « Il n’y a pas de routes, de centres de santé, d’écoles, de puits, de structures de base pour la vie quotidienne. En fait, il n’y a rien » Rapporté in Le Monde diplomatique, avril 2012. 

[4] Parmi ces soulèvements, figurent la révolte de Kaocen (1916-1917), au Niger, le soulèvement Touareg de 1962-1963 au Mali, le soulèvement Touareg de 1990-1995 au Mali et au Niger, le soulèvement Touareg du 23 mai 2006 au Mali, le soulèvement Touareg de 2007-2009 au Mali et au Niger, le soulèvement Touareg de 2012 au Mali, pour la libération de l’Azawad.

[5] En langue Tamasheq (Amazighe)  « Azawad » signifie « le territoire de transhumance ». On y retrouve des villes telles que Tombouctou, Kidal, Gao...

[6] Il convient de noter que le MNLA met en avant la devise (« Unité – Justice – Liberté »), et ne se limite pas à des revendications qui concerneraient les seuls Touaregs. Cela s’explique par le fait que l’ Azawad  est formé de diverses communautés : Arabes, Peuls, Songhaïs, Touaregs à la peau claire, Touaregs noirs.  

[7] Source: toumastpress.com 

[8] « En ce qui concerne le pétrole, l'Algérie est présente au Mali (ainsi qu'au Niger et en Mauritanie) depuis moins de dix ans, mais avec une position très dominante. Au nord, l’Algérie a pris des blocs par l'intermédiaire de Sipex, filiale internationale de sa société nationale, la Sonatrach, et s'est associée avec l'italienne ENI pour partager les coûts d'exploration. Les deux sociétés opèrent un bloc très prometteur, mais le premier forage aurait dû avoir lieu en février, comme l'avait promis l'ex-premier ministre (arrêtée par la junte) ». Benjamin Augé, in  Journal Le Monde, du 04.04.2012.

[9] Acherif Ag Intakwa, in toumastpress.com

[10] Le MNLA est issu d’une fusion, le 16 octobre 2011, entre le Mouvement national de l'Azawad (MNA), un groupe d'intellectuels et de militants politiques, et le Mouvement touareg du Nord Mali (MTNM), mouvement guérillero à l’origine des soulèvements de 2006 à 2009. Divers groupes d'ex-rebelles touaregs fuyant le Mali dans les années 1990 pour s'engager dans l'armée libyenne de Mouammar Kadhafi ont rejoint le MNLA à la chute du régime libyen en rapatriant un nombre important d'armement donnant ainsi plus de visibilité dans le rapport de force pour la libération de l'Azawad. Voir http://www.grip.org/fr/siteweb/images/NOTES_ANALYSE/2012/NA_2012-05-22_FR_J-DUFOUR.pdf

[11] Voir Mimoun Charqi. « L’autonomie stade suprême des droits des peuples », in https://charqi.blog4ever.com

[12] « Selon une source gouvernementale, ils seraient en possession de missiles anti-aériens, de camions lance-roquettes BM-21 Grad, de mitrailleuses de calibre12,7 mm et de dizaines de véhicules 4x4 » Le New York Times relate dans un article de février 2012 les déclarations du ministre des Affaires étrangères malien de l’époque concernant l’armement du mouvement : « Des armes lourdes. Armes anti-char, missiles anti-aériens ». Un militaire haut gradé parle lui aussi « d’une artillerie lourde », de « mortiers », d’un arsenal « assez puissant pour leur permettre d’atteindre leur but ». In  « Le retour des Touareg au Mali et au Niger : quels enjeux ? », Nouvelles du GRIP, 4/11.  Voir également,  « Qaddafi’s weapons, taken by old allies, reinvigorate an insurgent army in Mali », New York Times, 5 février 2012. 

[13] Le groupe rappelle officiellement qu'il rejette le terrorisme et l'extrémisme sous toute ses formes et qu'il n'est pas « un mouvement touareg, ni une rébellion Touarègue, mais un mouvement politico-militaire pour l'ensemble du peuple de l'Azawad ». 

Tandis que ce qui est recherché par les autres organisations précitées tient à une conquête, à une islamisation salafiste jihadiste et à une maîtrise de l’ensemble du Sahel dans un premier temps, en attendant de conquérir d’autres contrées à l’échelle mondiale. Faut-il dire que le MNLA a refusé les appels du pied (13) des autres organisations précitées, qui projetteraient un regroupement y compris avec le Polisario ? Faut-il dire que le MNLA se refuse à tout compromis avec le terrorisme, les trafics de drogues, les prises d’otages ? Etc.

[14] Le 26 mai 2012, après avoir annoncé, sa fusion avec le groupe islamiste Ansar Eddine, et la création du Conseil transitoire de l'État islamique de l'Azawad, le MNLA a proclamé son désaccord, le 29 mai 2012, en raison de son option laïque et au motif que le document final avait été modifié après signature avec le rajout à l’insu du MNLA de l'application de la « charia » dans le nouvel Azawad. Le 7 juin, le MNLA a annoncé la composition du Conseil transitoire de l'État de l'Azawad (CTEA) formé de 28 membres et ayant comme président Bilal Ag Achérif. 

[15] Dans une interview au journal Le Monde, l’ex-Premier ministre Algérien, Ahmed Ouyahia a déclaré :
 « Nous sommes pour une solution qui passe par le dialogue. L’Algérie n’acceptera jamais une remise en cause de l’intégrité territoriale du Mali”. Force est de noter l’ambivalence dans le discours et les positions quand on sait l’attitude de l’Algérie dans le dossier du Sahara occidental.

[16] Anthropologiste à l’University of London, spécialiste de la zone Sahélo Saharienne. 

[17] Dans le même sens :

« (...) le GSPC est une création des services secrets de l’armée algérienne, (...) le « terrorisme résiduel » du GSPC est un de leurs instruments pour consolider leur mainmise sur les richesses du pays et pour se légitimer auprès des puissances occidentales (...) ». François Gèze et Salima Mellah, Algeria – Watch, 22 septembre 2007. Résume du rapport. 73 pages. 

[18] Voir la déclaration de l’indépendance de l’Azawad, 06/04/2012

[19] « La proclamation d’indépendance de l’Azawad par les touaregs du MNLA, ce vendredi 6 avril, a été condamnée de façon catégorique par les différents partis maliens ainsi que par l’Union africaine et la communauté internationale. Chacun s’accorde à dire que l’intégrité territoriale de cette région du nord du Mali n’est pas négociable et souhaite que le MNLA revienne à la raison, de gré ou de force ». http://www-beta.rfi.fr/afrique/20120406-mali-independance-azawad-unanimement-rejetee-union%20africaine-mnla 

[20] « Nous aspirons à une indépendance culturelle, politique et économique mais pas à la sécession » Ibrahim Ag Assaleh, dirigeant du MNLA», rapporté par Le Nouvel Observateur. « L’indépendance est notre objectif depuis le début du conflit, mais nous prenons en compte le point de vue de la communauté internationale pour venir à bout de la crise en cours ». Hama Ag Mahmoud, porte parole du CNTA.

[21] Pour le texte du Manifeste de Tamazgha, voir https://charqi.blog4ever.com

 

 


07/09/2012
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MANIFESTE DE TAMAZGHA

MANIFESTE DE TAMAZGHA[1]

 

Pour une Confédération démocratique,

sociale et transfrontalière, basée sur

le droit à l’autonomie des régions

 

 

Avertissement

En sus des principes et valeurs ancestrales des sociétés amazighes, ce manifeste est basé sur les textes internationaux de référence qui consacrent le standard minimum de civilisation et démocratie dont la Déclaration universelle des droits de l’Homme (10 décembre 1948), la Convention européenne des droits de l’Homme (4 novembre 1950), la Convention de Genève (28 juillet 1951), la Convention des Nations-Unies relative aux droits de l’enfant (20 novembre 1989), la Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement (12 août 1992), la Convention cadre pour la protection des minorités nationales (1995), le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (16 décembre 1996), le Pacte international relatif aux droits économique, sociaux et culturels, (16 décembre 1996), la Déclaration de l’Organisation Internationale du Travail relative aux principes et droits fondamentaux au travail (1998), la Convention des Nations Unies contre la corruption (29 septembre 2003) et le Pacte mondial des Nations-Unies (juillet 2000) ainsi que la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.
((((13 septembre 2007).

 

 

MANIFESTE DE TAMAZGHA

PREAMBULE

 

Nous acteurs, militants, personnalités et représentants des peuples des différents Etats de Tamazgha adhérons au présent Manifeste pour la création d’une Confédération ayant pour objectif d’unir tous les citoyens de Tamazgha et d’œuvrer pour la défense des droits et de l’identité des amazighs.

 

Le Manifeste de Tamazgha a pour but la diffusion de la démocratie participative, effective et réelle au niveau des populations vivant dans l’espace Tamazgha, afin d’intégrer les différents groupes ethniques, culturels, religieux et autres.

 

Le Manifeste de Tamazgha sans remettre en cause les frontières politiques existantes a pour objectif la consécration du droit à l’autonomie des régions dans chaque Etat de Tamazgha et l’établissement de structures fédérales ouvertes à tous les peuples de Tamazgha,  au Maroc, en Algérie, en Tunisie, en Libye, en Egypte, au Mali, au Niger, en Mauritanie et dans les îles Canaries, ainsi que de par le monde.

 

Le Manifeste de Tamazgha repose sur le vécu historique des sociétés amazighes et sur leur héritage collectif. Consciente de son patrimoine spirituel, moral, religieux et culturel, ainsi que de sa pluralité, sa diversité et sa nécessaire unité, le mouvement de Tamazgha se fonde sur les valeurs indivisibles et universelles de dignité humaine, de liberté, d’égalité et de solidarité; il repose sur le principe de démocratie participative, effective et réelle ainsi que sur le principe de la consécration et du respect de l’Etat de droit. Le mouvement de Tamazgha place l’individu au cœur de son action en instituant la citoyenneté de Tamazgha et en oeuvrant pour un espace de liberté, de vivre ensemble, de tolérance, de paix et de justice économique, sociale, politique, et autres.

 

Le Mouvement pour la Confédérationde Tamazgha privilégie l’auto-administration politique, connue sous le nom de démocratie participative, dans laquelle chacun et tous les groupes de la société, ainsi que toutes les identités culturelles, ont la possibilité de s’exprimer par le biais de réunions locales et régionales, de conventions générales et de conseils. Cette vision de la démocratie ouvre ainsi l’espace politique à toutes les couches de la société et permet la formation de groupes politiques divers et variés, ce qui constitue de ce fait un progrès dans l’intégration politique de l’ensemble de Tamazgha. Ainsi, par la création d’un niveau opérationnel où tous les groupes politiques, sociaux, économiques ou culturels ainsi que toutes les communautés religieuses s’expriment directement dans les processus locaux et régionaux de prise de décision, Tamazgha renforce l’autonomie structurelle des acteurs sociaux et créée les conditions nécessaires à l’organisation de l’ensemble dela Confédération.

 

Tamazgha est une Confédération des Etats fédéraux d’Afrique du Nord. Chaque Etat fédéral est formé des entités fédérées, à savoir les régions autonomes. Les régions autonomes fédérées sont chargées de l’application du processus démocratique de prise de décision depuis le niveau local jusqu’au niveau global, et ce, dans le cadre d’un processus politique continu.

 

La Confédérationde Tamazgha est dotée d’un Parlement confédéré. Ce dernier en tant qu’organe législatif supra national est chargé d’œuvrer selon le Manifeste de Tamazgha et de faire progresser la paix, le bien être et la justice dans l’espace de Tamazgha.

 

Tamazgha, en tant que partie de l’Afrique s’assigne, en outre, comme l’un des objectifs la réalisation de l’unité africaine.

 

Les langues officielles de Tamazgha sont l’amazigh standard et l’arabe. Les autres langues de Tamazgha (les différents dialectes arabes et les différentes variantes amazighes) sont aussi officielles dans leurs régions respectives conformément aux statuts de ces régions. La richesse de la diversité linguistique de Tamazgha est un patrimoine culturel qui fait l’objet d’un respect et d’une protection spéciale.

 

Consciente de la nécessité d’inscrire son action dans le cadre des organismes internationaux, la Confédérationde Tamazgha souscrits aux principes, droits et obligations découlant des Chartes desdits organismes et réaffirme son attachement aux droits humains tels qu’ils sont universellement reconnus et réaffirme la détermination à œuvrer pour le maintien de la paix et de la sécurité dans le monde.

 

TITRE PREMIER

DISPOSITIONS GENERALES ET PRINCIPES FONDAMENTAUX

 

Article 1. Tamazgha est une Confédération démocratique, sociale et transfrontalière basée sur le droit à l’autonomie des régions.

 

Article 2. La souveraineté appartient aux peuples de Tamazgha qui l’exercent directement par voie de référendums et indirectement par l’intermédiaire des institutions constitutionnelles fédérales élues librement et démocratiquement dans chaque Etat fédéral dela Confédération.

 

Article 3. Les partis politiques au niveau de Tamazgha contribuent à l’expression de la volonté politique des citoyens de la Confédération. Il ne peut y avoir de parti unique dans l’espace de Tamazagha.

 

Article 4. Tout citoyen de Tamazgha a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association à tous les niveaux, notamment dans les domaines politique, syndical et civique. Toute personne a le droit de fonder avec d’autres des organisations syndicales et de s’y affilier pour la défense de ses intérêts. 

 

Article 5. Tamazgha est une confédération neutre. Cependant, chacun dispose de la liberté de religion, de conscience et de pensée. La liberté de religion et de conscience comprend le droit de confesser et de pratiquer une religion, le droit d’exprimer ses convictions et le droit d’appartenir ou non à une communauté religieuse. Nul n’est tenu de pratiquer une religion contrairement à sa conscience.

 

Article 6. L’emblème de Tamazgha est le drapeau tricolore à bandes horizontales, bleu, vert et jaune frappé en son centre de la lettre tifinagh (Z) en rouge. 

 

Article 7. La devise de Tamazgha est EGALITE, LIBERTE, SOLIDARITE. 

  

TITRE II

LA DIGNITE HUMAINE

 

Article 8. La dignité humaine est inviolable. Elle doit être respectée et protégée.

 

Article 9. Toute personne a droit à la vie. Nul ne peut être condamné à la peine de mort, ni exécuté.

 

Article 10. Nul ne peut être soumis à la torture, ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. 

 

Article 11. La traite des êtres humains est interdite.

 

Article 12. Nul ne peut être tenu en esclavage ni en servitude.

 

Article 13. Nul ne peut être contraint à accomplir un travail forcé ou obligatoire.

 

TITRE III

LES LIBERTES

 

Article 14. Tout citoyen a droit à la liberté et à la sécurité.

 

Article 15. Tout citoyen a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile, de sa correspondance et de ses communications.

 

Article 16. Tout citoyen a droit à la liberté d’expression. Ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence des autorités publiques ou autres.

 

Article 17. La liberté des médias et leur pluralisme sont respectés et protégés. Aucun journaliste ne peut faire l’objet de poursuite judiciaire dans le cadre de l’exercice de ses fonctions. 

 

Article 18. Tout citoyen à droit à l’éducation. Ce droit comporte la faculté de suivre gratuitement l’enseignement obligatoire. L’enseignement est obligatoire jusqu’à l’obtention du diplôme des études secondaires (Baccalauréat). Les Etats fédéraux de Tamazgha doivent faire de l’éducation la priorité des priorités.

 

Article 19. La liberté de créer des établissements d’enseignement dans le respect des principes démocratiques, ainsi que le droit des parents d’assurer l’éducation et l’enseignement de leurs enfants conformément à leurs convictions religieuses, philosophiques et pédagogiques, sont respectés selon les lois de chaque  Etat fédéral qui en régissent l’exercice.

 

Article 20. Tout citoyen de Tamazgha a la liberté de chercher un emploi, de travailler, de circuler, de s’établir ou de fournir des services dans tous Etats dela Confédération.

 

Article 21. Tout citoyen a le droit de travailler et d’exercer une profession librement choisie ou acceptée.

 

Article 22. Toute personne a le droit de jouir de la propriété des biens qu’elle a acquis légalement, de les utiliser, d’en percevoir les fruits et les revenus, d’en disposer et de les léguer. Nul ne peut être privé de sa propriété. Cependant, ce droit peut connaître des limites dans le cas d’expropriation pour cause d’utilité publique, de classement des monuments et des sites, des plans d’aménagement des territoires. Les propriétaires, victimes des limites relatives au droit de propriété, dans les cas et les conditions prévus par la loi perçoivent préalablement une juste indemnité pour les pertes subies. L’usage des biens peut être réglementé par la loi dans la mesure nécessaire à l’intérêt général. Les biens de main morte (Habous) et les biens collectifs (Al Jamaa) sont concernés par le présent article.

 

Article 23. Nul ne peut être éloigné, expulsé ou extradé vers un Etat où il existe un risque qu’il soit soumis à la peine de mort, à la torture ou à d’autres peines ou traitements inhumaines ou dégradants. Les expulsions collectives sont interdites.

 

Article 24. Le droit d’asile est garanti dans le respect des règles de la Convention de Genève du 28 juillet 1951.

 

TITRE IV

L’EGALITE

 

Article 25. Tous les citoyens de Tamazgha sont égaux en devoirs et en droits.

 

Article 26. Est interdite toute discrimination basée sur le genre, les origines ethniques ou sociales, la langue, la religion ou les convictions, les opinions politiques ou toute autre opinion, l’handicap, l’âge ou autres.

 

Article 27. La Confédération de Tamazgha respecte et défend  la diversité culturelle, religieuse et linguistique.

 

Article 28. L’égalité entre les femmes et les hommes doit être assurée dans tous les domaines, y compris en matière de travail, de rémunération et d’héritage.

 

Article 29. Le droit de se marier avec la personne de son choix et le droit de fonder une famille sont garantis. Les mariages forcés sont interdits.

 

Article 30. La protection de la famille est assurée sur le plan juridique, économique et social. 

 

Article 31. L’enfant a droit à la protection et aux soins nécessaires à son bien-être. L’intérêt supérieur de l’enfant doit faire l’objet d’une considération primordiale de la part des autorités publiques et des institutions privées.

 

Article 32. Le travail des enfants est interdit. L’âge minimal d’admission au travail ne peut être inférieur à l’âge auquel cesse la période de scolarité obligatoire.

 

Article 33. La Confédération de Tamazgha respecte, reconnaît et protège le droit des personnes âgées à mener une vie digne.

 

Article 34. La Confédération de Tamazgha respecte et reconnaît le droit des personnes handicapées à bénéficier de mesures visant leur intégration sociale et professionnelle ainsi que leur participation à la vie de la société.

 

TITRE V

LA SOLIDARITE

 

Article 35. La Confédération de Tamazgha œuvre pour un développement économique dans le respect de l’environnement, des droits de l’Homme et de vraies règles sociales pour tous conformément au principe du développement durable. 

 

Article 36. La Confédération de Tamazgha reconnaît et respecte le droit d’accès aux prestations de sécurité sociale et aux services sociaux assurant une protection dans des cas tels que la maladie, la maternité, les accidents du travail, l’invalidité, la dépendance ou la vieillesse et la perte d’emploi.

 

Article 37. Afin de combattre la pauvreté et l’exclusion sociale, la Confédération de Tamazgha reconnaît, respecte et protège le droit à une aide sociale et à un droit au logement destinés à assurer une existence digne à tous ceux qui ne disposent pas de ressources suffisantes.

 

Article 38. Toute personne a le droit de bénéficier gratuitement de soins médicaux. 

 

Article 39. La jouissance des droits issus du principe de la solidarité entraîne des responsabilités et des devoirs tant à l’égard d’autrui qu’à l’égard de la communauté humaine et des générations futures.

 



[1] Projet validé par l’Assemblée Mondiale Amazigh du 9, 10 et 11 décembre 2011, réunie en assemblée générale constitutive à Bruxelles et soumis à la lecture des associations locales, régionales et nationales, pour avis, avant adoption définitive à l’assemblée générale extraordinaire prévue fin octobre 2012 à Nador.

 


19/01/2012
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