- Mimoun Charqi - ANALYSE POLITIQUE ET JURIDIQUE -

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4. DROIT ET THEORIE GENERALE DU DROIT


ETAT DE DROIT ET CITOYENNETE ENTRE REALITES ET PERSPECTIVES

ETAT DE DROIT ET CITOYENNETE ENTRE REALITES ET PERSPECTIVES

  Communication pour le colloque national et international sur :

« La citoyenneté, projet d'Etat pour une nouvelle société ».

Université Saint-Esprit  de Kaslik. Liban.

15, 16 et 17 mars 2007.

Permettez moi, tout d'abord, de vous remercier de m'inviter à participer, aujourd'hui, à ce débat, combien important, et, ensuite, de vous exprimer mes sentiments solidaires afin que le Liban, ce pays cher au cœur, et avec lui les autres Etats de la région, trouvent la voie de la paix, de la sérénité, de la démocratie, de l'Etat de droit et de la citoyenneté pleine et effective. Ma présente communication est pensée sous forme de propositions et d'idées, à mêmes de pouvoir enclencher autour d'elles un débat.

Les notions d'Etat de droit et celle de citoyenneté apparaissent comme des concepts d'actualité dans les sociétés qui aspirent à la démocratie et à la modernité. Les discours officiels, de bien des pays, regorgent de références à ces concepts. D'où, l'intérêt de savoir ce que sont les différentes significations des concepts, qu'il est possible de relever, et, par suite, de faire la part des choses entre le discours et la réalité, puis entre les réalités et perspectives, avant de s'interroger, au titre de considérations finales, sur les modalités pratiques nécessaires et requises pour l'ancrage de l'Etat de droit et de la citoyenneté dans les sociétés qui y aspirent. Ce seront là, les trois axes de ma communication.

I. Les significations plurielles des notions de  « l'Etat de droit » et de « la citoyenneté »

Les concepts peuvent avoir des significations multiples. D'où l'intérêt de savoir exactement ce qu'il en est pour éviter toutes confusions. C'est le cas de la notion de « l'Etat de droit » et de celle de « citoyenneté ». Une citoyenneté qui suppose des valeurs et principes dont bien des personnes, de par le monde, sont exclus d'un exercice effectif. 

1. L'intérêt de connaître du sens des concepts

Les notions d'Etat de droit et de citoyenneté ont des significations plurielles. Les définitions et sens des concepts utilisés ne s'accordent pas toujours entre eux et, à la limite, peuvent se situer l'un aux antipodes de l'autre. D'où l'intérêt à se pencher sur les définitions afin d'éviter toutes confusions et de savoir exactement ce que l'on entend et de quoi l'on parle. 

2. L'Etat est-il le droit ?

Prenons le cas de la notion d'Etat de droit. Par définition, si l'on en croit Hans Kelsen(1), l'Etat c'est le droit et inversement le droit c'est l'Etat. Ainsi, si l'on admet cette assertion, par définition, tous les Etats seraient des Etats de droit. Or, il semble que, tout éminent juriste et philosophe du droit qu'il soit, Hans Kelsen ne semble pas avoir entièrement raison quant il affirme que l'Etat c'est le droit. Car, le principe de réalité permet de constater que l'Etat peut exister sans respecter son propre droit. Peut on alors encore parler d'Etat de droit ? Faudrait-il opposer la notion d'Etat de droit à celle d'Etat de non droit ? Comment qualifier un Etat non respectueux du droit international des droits de l'homme, ni même de son propre droit ? Faut-il le préciser ? L'Etat de droit peut aussi être un Etat de droit injuste, inéquitable, odieux, barbare,… Ainsi, l'Etat de droit peut être autre que juste, légitime et conforme aux standards internationaux des droits de l'homme ! Mais, au-delà de ces considérations de théorie générale du droit, il est usuel d'entendre, lorsqu'on parle d'Etat de droit qu'il s'agit d'un Etat de droit respectueux des grands principes que sont la démocratie, la citoyenneté et les droits de l'homme.

3. L'exercice entier et effectif de droits

La citoyenneté (2) n'est pas une simple déclaration, ou proclamation, figurant dans des textes. La citoyenneté est la possibilité de pouvoir exercer effectivement et pleinement des droits selon un standard minimum de civilisation, avec tout ce que cela peut comporter comme valeurs : La liberté d'expression et d'action pour autant qu'elle prônent des valeurs saines et pacifiques. La présomption d'innocence, le droit à des égards, le droit à la dignité, le droit à une vie décente, à la santé, à l'égalité, à l'intégrité physique, etc., sont des valeurs et principes requis pour l'Etat de droit, la citoyenneté et la démocratie. 

4. Des valeurs et principes

        Si la citoyenneté suppose l'existence et l'exercice d'un ensemble de valeurs et principes, ces mêmes valeurs et principes supposent des conditions requises aux fins d'ancrage de l'Etat de droit, de la citoyenneté et de la démocratie dans un pays :

          -         la pression internationale ;

          -         la paix sociale, économique, politique, …

          -         le développement de la culture des droits de l'homme ;

          -         l'éradication de la pauvreté, de l'analphabétisme,…

          -         la séparation des pouvoirs et autres confusions d'intérêts ;

          -         la tolérance ;

          -         l'intégration, plutôt que l'exclusion sociale ;

          -         etc.

5. Les exclus de la citoyenneté

Tout comme dans la Grèce antique, certaines catégories (les femmes, les étrangers, les métèques et les esclaves) étaient exclues de la citoyenneté, il faut reconnaître  que tout un chacun, dans les sociétés et Etats d'aujourd'hui ne bénéficie pas de l'ensemble des attributs de la citoyenneté. Notons qu'avec l'Empire romain, la citoyenneté a vocation universelle sans critère d'origine ethnique, puisque les étrangers peuvent y accéder. Aujourd'hui, la citoyenneté n'est pas la même selon les ressortissants de tels ou tels pays. Et au sein d'un même Etat, tous les individus ne jouissent pas du même degré de citoyenneté, selon qu'ils soient nantis ou pas, selon qu'ils soient détenteurs de pouvoirs ou pas.

II. Discours, réalités et perspectives de l'Etat de droit et de la citoyenneté

Les discours politiques sur l'Etat de droit, la citoyenneté et la démocratie relèvent souvent de la seule sphère idéologique et ne s'accordent pas toujours avec les réalités. Quant aux perspectives à venir, elles dépendent étroitement principalement d'une prise de conscience et de revendications des concernés, puis accessoirement, de la pression et de l'environnement extérieur.

1. Les discours sur la citoyenneté

La référence aux notions d'Etat de droit, de citoyenneté et de démocratie ne serait-elle qu'un effet de mode, sous la pression internationale ? On a pu voir, au niveau de l'union européenne, ce que sont les conditions exigées des Etats aspirant à devenir membres de la communauté européenne, tel que la Turquie. L'opinion publique, surtout internationale, se retrouve souvent servie un discours sur des valeurs et principes universels. Les opinions nationales des Etats concernés ne sont pas en reste. Ce discours participe bien plus à de l'idéologie qu'à une volonté politique de changement et de mise en place des instruments et moyens à même d'assurer le règne de l'Etat de droit et de la démocratie en consolidant la citoyenneté.

2. Les règles juridiques et les règles politiques

Bien souvent, malheureusement, notamment dans les relations internationales, il a été affirmé que la règle juridique prime la règle politique, pour justifier des agissements en marge voire en violation du droit. Il est curieux de relever que les démocraties, pourtant soucieuses du respect de leurs droits internes, et de leurs conditions de forme et de fond quant il s'agit de leurs relations internes respectives n'ont pas toujours la même attitude à l'international. C'est le cas, notamment, d'Israël, et des Etats-Unis d'Amérique.

3. L'Etat de droit

Néanmoins, au-delà de ces considérations théoriques, toujours est-il que nombre d'Etats candidats déclarés à la démocratie utilisent dans leurs discours la référence à la notion d'Etat de droit, voire même à celle d'Etat de droit économique en raison d'une volonté de rassurer des investisseurs étrangers craintifs de l'insécurité juridique. Toujours est-il que l'Etat de droit effectif est un « préalable nécessaire à la démocratie, elle-même gage de l'effectivité citoyenne »(3).

4. Le combat pour la citoyenneté

Si l'on dit que « le combat pour la citoyenneté n'est jamais terminé », encore faut-il que partout il ait commencé. La citoyenneté peut se retrouver en crise(4). Des Etats développés souffrent de ce problème. Il n' y a qu'à voir ce qui s'est passé, en France, avec les émeutes des banlieues. La résidence ne signifie pas forcément la citoyenneté. D'aucuns, en appellent à une citoyenneté de résidence.  La crédibilité de L'Etat apparaît eu égard au comportement des personnes à l'occasion des élections. Participent-ils ou s'abstiennent t-ils de voter, car convaincus que les tripatouillages feront que leurs volontés ne seront pas respectées.

5. Des préoccupations citoyennes diverses

Les préoccupations vis-à-vis de l'Etat de droit, de la citoyenneté et de la démocratie ne sont pas identiques selon les Etats : Paix sociale, statut du citoyen, droits et libertés, Etat providence, vote, débat citoyen, représentation et participation politique, pluralisme culturel, parité hommes femmes, droit à la vie et à l'intégrité physique,…

6. Citoyenneté et démocratie

La notion de citoyenneté, quant à elle, participe aussi aux discours des Etats se voulant engagés vers la démocratie. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, les démocraties consolidées, à l'inverse des Etats déclarant aspirer à la démocratie, ne ressentent pas, ou peu, le besoin d'utiliser dans leurs discours les références à ces concepts. Mais qu'est ce que la citoyenneté ? Peut-on valablement opposer la notion de citoyen à celle de sujet ? Rien ne serait plus faux ! Il est des sujets, comme c'est le cas des sujets de Sa Majesté britannique, qui sont  des citoyens à part entière. Tandis que des citoyens annoncés de nombre d'Etats candidats déclarés à la démocratie, tout au moins au niveau du discours, sont loin de jouir de tous les attributs de la citoyenneté. Finalement, il apparaît que les notions d'Etats de droit et de citoyenneté sont indissociables de celle de démocratie. Il n'y a pas d'Etat de droit, ni de citoyenneté véritables sans démocratie. Quant à la Démocratie, elle ne se décrète pas, elle se pratique. D'ailleurs, si la citoyenneté dans les pays occidentaux s'apparente au droit de vote, dans les pays candidats à la démocratie, à l'Etat de droit et à la citoyenneté, cela ne saurait se limiter à un hypothétique droit de vote. La forme et le fond étant des choses bien différentes. Si la citoyenneté ne s'acquiert pas à la naissance, par contre elle est le fruit de toute une série de volontés, de tout un processus, de tout un ensemble de mesures et d'exercice effectifs de droits sociaux, économiques, politiques, culturels,…

7. Les degrés de citoyenneté

Les notions d'Etat de droit et de citoyenneté semblent dévoyées, tellement elles ont pu être galvaudées et utilisées à tord et à travers à desseins politiques. Le citoyen est porteur et jouit d'un ensemble de droits et devoirs. L'appartenance à un groupe social étatique, national ou autre, ne fait pas, ipso facto, de l'individu un citoyen à part entière. A moins de considérer qu'il y aurait des degrés de citoyennetés selon les types de pays. Les niveaux ou stades de développement économique, culturel, politique, démocratique et autres contribuent au façonnement et au rayonnement ou pas de l'Etat de droit et de la citoyenneté. D'aucuns parlent aujourd'hui de citoyenneté mondiale, de citoyenneté universelle, européenne, dépassant ainsi la citoyenneté liée à l'Etat nation. Mais là encore, il faut faire la part des chose entre l'être et le devoir être. Notons que, bien souvent, l'Etat-nation(5) centralisé et unitaire va à l'encontre de la démocratie et de la citoyenneté.

8. Les conflits et la citoyenneté

La multiplication des conflits et tout particulièrement ceux dans lesquels sont partie prenante les Etats Unis d'Amérique ne semblent pas permettre l'émergence, le développement et la consolidation de l'Etat de droit, de la citoyenneté et de la démocratie. Ce qui est sûr et certain, c'est que l'on ne peut pas imposer la démocratie, l'Etat de droit et la citoyenneté par la force des canons et des bombes. C'est ce qu'on a pu voir dans le cas de l'Irak, de l'Afghanistan, de la Palestine, du Liban,…

9. Le droit et la citoyenneté

L'aspect juridique de la citoyenneté veut que le citoyen soit titulaire de droits et devoirs : droits de l'homme, droits civils et politiques, droits économiques, sociaux et culturels. Le droit international des droits de l'homme reconnaît tout cela. Toujours est-il qu'il y a bien souvent un hiatus entre le droit et la réalité. Droits et citoyenneté ne s'octroient pas naturellement. Cela suppose une prise de conscience, des réclamations, un long processus,… 

10. Le politique et la citoyenneté

L'aspect politique de la citoyenneté voudrait que l'individu et tout particulièrement l'ensemble des individus, (le peuple) soit détenteur de la souveraineté. Souveraineté politique, nationale, populaire. D'où le lien avec les élections, la représentation, les mandats électoraux, la démocratie,…

A l'instar des degrés ou niveau de développement et /ou de sous développement, on peut relever des degrés et niveaux différents en matière d'Etat de droit, de citoyenneté réelle ou déclarée de démocratie effective ou d'annonce, de totalitarisme,…

Mais l'utilisation idéologique des concepts et valeurs au niveau du discours peut conduire à un retour de l'idéologie sur elle-même. C'est ce que le professeur Charles Chaumont(6) appelle « l'effet boomerang de l'idéologie », ou le retour de l'idéologie sur elle même. 

III. Conditions requises pour l'ancrage de l’État de droit et de la citoyenneté

Les conditions nécessaires à un ancrage de l'Etat de droit et de la citoyenneté, dans une société donnée, sont multiples et diverses selon les Etats et sociétés. Mais qu'en est-il des plus importantes ? 

1. Développement et citoyenneté

Quel rapport entre développement, d'une part, et Etat de droit, citoyenneté et démocratie, de l'autre ? La pauvreté, l'instabilité politique, les guerres et autres conflits armés peuvent-ils assurer l'Etat de droit, la citoyenneté et la démocratie ? La paix sociale, économique, politique et autre est nécessaire à l'existence de l'Etat de droit, de la citoyenneté et de la démocratie. 

2. Séparation des pouvoirs et citoyenneté

 Qu'en est-il de la séparation des pouvoirs ? Traditionnellement, l'on distingue trois pouvoirs qu'il faut séparer afin d'éviter l'absolutisme et les abus : le judiciaire, le législatif et l'exécutif. Force est cependant de rappeler que ce ne sont pas là les seuls pouvoirs qui existent dans une société et qu'il conviendrait de séparer afin de pouvoir assurer l'Etat de droit, la citoyenneté et la démocratie. Il faudrait tenir compte du pouvoir chaque jour plus croissant des médias, ainsi que du pouvoir économique et financier, puisque c'est là bien souvent le véritable pouvoir. Lorsque le détenteur du pouvoir attenant aux affaires, aux business, conquiert le pouvoir politique, ou inversement lorsque le détenteur du pouvoir politique se lance dans la course aux affaires, il n'est guère évident d'assurer le règne de l'Etat de droit, la citoyenneté et la démocratie.

3. La loi et la citoyenneté

Les lois sont-elles suffisantes pour asseoir l’État de droit, la citoyenneté et la démocratie ? Surtout dans les Etats n'ayant pas de tradition en matière de droits de l'homme ? Assurément, la loi ne vaut que dans la mesure où elle est respectée et appliquée. Non seulement la loi doit être bonne pour ainsi dire : juste et équitable, (car elle peut être tout le contraire), mais en sus il faut qu'elle soit respectée et surtout appliquée. 

4. L'éducation à la citoyenneté

Quid du rôle de la société civile dans l'édification de l'Etat de droit, de la citoyenneté et de la démocratie ? Les révolutions, dit-on, commencent par des idées. Naît-on citoyen, ou le devient-on ? La citoyenneté est un long apprentissage, une longue et continue lutte, un combat de tous les instants. L'éducation (7) est une condition essentielle pour d'édification de l'Etat de droit, la citoyenneté et la démocratie :

          -   Éducation aux droits de l'homme et à la citoyenneté, pour la promotion des principes et valeurs démocratiques ;

           -  Éducation à la responsabilité individuelle et collective ;

           -  Éducation au jugement par l'esprit critique et l'argumentation ;

           -  Etc.

In fine, les réalités ayant libre cours, de par le monde, en matière d’État de droit, de citoyenneté et de démocratie semblent avoir encore de beaux jours devant. Les perspectives d'avenir meilleur supposent des défis importants à relever et un travail de longue haleine et de tous les instants. Car, rien n'est jamais acquis.

 

 Copyright 2007. Mimoun CHARQI

Mode de citation: Mimoun CHARQI. " Etat de droit et citoyenneté entre réalités et perspectives". http://CHARQI.blog4ever.com

 

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1 Hans KELSEN. Théorie pure du droit. Traduction : Eisenman. Paris. Dalloz, 1979. 330 pages. Dans un sens différent, voire Romano SANTI. L'ordre juridique.

2 Thierry HENTSCH. « La citoyenneté : exercice impossible, idée nécessaire », article in  Yves BOISVERT, Jacques HAMEL et Marc MOLGAT. Vivre la citoyenneté. Identité, appartenance et participation. Montréal, Editions Liber, 2000.

3 Clarisse Ouoba MERINDOL. Démocratie, citoyenneté et intégration sociale. Forum intergénérationnel sur la gouvernance endogène en Afrique de l'Ouest. Ouagadougou, 26 – 28 juin 2006.

4 Daniel ANTONY et Michel BOURGEOIS. Citoyenneté et république : les nouveaux enjeux de la démocratie. Franche comté 2003.

5 Hugg SEGAL. Pour une nouvelle définition de la citoyenneté : dépasser l'Etat-nation. Institut de recherche en politiques publiques. Montréal. www.irpp.org

6 Charles CHAUMONT. Le secret de la beauté : Essai sur le pouvoir et les contradictions ». Seuil. Paris. 1987.

7 Saliou SARR. L'éducation à la citoyenneté : le rôle de l'école. http://www.eip-cifedhop.org/eipafrique/senegal/cit.html

 


11/05/2010
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LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME ENTRE DROITS INTERNES ET DROIT INTERNATIONAL[1]

LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME ENTRE DROITS INTERNES 

ET DROIT INTERNATIONAL[1]

 

                                   Mimoun CHARQI

                                                     https://charqi.blog4ever.com

 

 

Le recours à la violence et à l’usage des armes, explosifs et autres n’est plus depuis longtemps du monopole des Etats. Les groupes et individus eux même y recourent. La recrudescence des actions terroristes semble avoir atteint de nos jours des pics sans pareils. La notion de « terrorisme » et de « crime terroriste » n’est pas nouvelle et les Etats depuis longtemps, aussi bien à l’échelle des droits internes que du droit international, ont essayé d’y apporter des réponses légales. La définition même du concept de terrorisme[2]n’a pas été sans difficultés. La distinction, entre terrorisme de droit commun, terrorisme politique, résistance, terrorisme individuel ou de groupes et terrorisme d’Etat ou orchestré dans l’ombre par l’Etat, terrorisme national ou transnational et autres, rajoute à la complexité de la chose.

 

Le dilemme, au sujet de la lutte contre le terrorisme, est celui de l’équilibre entre les actions et mesures engagées, dans la lutte contre le terrorisme, d’une part, pour protéger les personnes et les biens et, d’autre part, pour le respect du droit d’une façon générale, en particulier le droit international des droits de l’homme, et les droits de l’homme.

 

Le précepte est que rien ne saurait justifier les atteintes aux droits de l’homme, au motif de la lutte contre le terrorisme, de la sécurité nationale ou internationale... Pourtant, bien des Etats parmi les plus puissants même, ont souvent laissé de côté ce précepte. Or, l’Etat de droit ne peut légitimement verser dans l’illégalité ; autrement, il perd ainsi toute crédibilité. Avant d’aborder la question du dilemme, voyons ce qu’il en est du cadre légal général de la lutte contre le terrorisme.

 

I. Le cadre légal de la lutte contre le terrorisme

 

La particularité du terrorisme contemporain est qu’il revêt, de plus en plus, des ramifications internationales voire transnationales. Ce n’est pas sans raison, si à l’échelle universelle, la communauté internationale s’est efforcée de cerner la question du terrorisme. Le cadre normatif pour la lutte contre le terrorisme n’a eu cesse d’évoluer. Divers mécanismes et instruments internationaux conventionnels universels ou régionaux ont été adoptés. Il en découle des obligations à la charge des Etats. L’obligation d’incriminer les actes et actions figurant dans les conventions internationales et leurs protocoles, ainsi que l’obligation de prévoir dans le droit interne des peines quant aux actes terroristes tels que définis par le droit international.

 

  1. Le cadre légal international de la lutte contre le terrorisme

Le terrorisme pose un problème non seulement de sécurité nationale, mais aussi internationale. Le Conseil de sécurité des Nations Unies, en tant qu’organe chargé de la sécurité internationale et des menaces contre la paix, s’est chargé bien après l’Assemblée Générale (1972) de la question.

 

Durant la guerre froide, le Conseil de sécurité n’a pas pu se mettre d’accord pour considérer le terrorisme comme une menace contre la paix et la sécurité internationale. Avec la fin de la guerre froide, le Conseil de sécurité traite les situations au cas par cas (affaire de Lockerbie, 1992, affaire du Soudan (1996) et affaire des Talibans de 1998) et un tournant décisif apparaît dès septembre 2001. Puisque dans la foulée des attentats, soit le 12 septembre 2001, le Conseil de sécurité adopte, à l’unanimité la résolution 1368 (2001) qui reconnaît « tout acte de terrorisme international comme une menace contre la paix et la sécurité internationales».

 

La coopération judiciaire apparaît comme l’une des voies importantes des Etats dans la lutte contre le terrorisme, certains Etats ont quant à eux choisi la voie militaire pour la lutte contre le terrorisme.

 

La lutte contre le terrorisme passe nécessairement par la lutte contre le financement, l’asile, les appuis actifs ou passifs, ...

Le Conseil de sécurité s’est substitué, suite aux événements du 11 septembre 2001, aux prérogatives et attributions classiques de l’Assemblée Générale des Nations Unies.

 

La lutte contre le terrorisme devient une obligation internationale, de surcroît encadrée par des institutions internationales telles que le Conseil de sécurité des Nations unies, le Comité 1267, le Comité contre-terrorisme et le Comité 1540.

 

La résolution 1566 (2004) octobre  2004 va, en effet, plus loin que les résolutions 1373 (2001) et 1540 (2004), car le Conseil de sécurité y rappelle que « les actes criminels, notamment ceux dirigés contre les civils dans l’intention de causer la mort ou de blessures graves (...) qui sont visés et érigés en infractions dans les conventions et protocoles internationaux relatifs au terrorisme, ne sauraient en aucune circonstance être justifiés par des motifs de nature politique, philosophique, idéologique (...)».

 

         - Le Comité 1267 (comité des sanctions contre Al Qaïda et les Talibans) est composé par les états membres du Conseil de sécurité ; ce Comité tient une liste actualisée des individus et organisations liées à Al Qaïda, les talibans et Ben Laden.

 

         - Le Comité contre le terrorisme[résolution CS1373 (2001)], veille au suivi, au dialogue et à la coopération, assistance et coopération pour les mesures à la charge des Etats, dans leurs législations internes, au regard de cette même résolution.

 

         - Le Comité 1540 [(résolution CS 1540  (2004)  du 28  avril  2004)] a pour objet la prévention  du  risque d’utilisation d’armes de destruction massive par des acteurs non étatiques, en particulier par des groupes terroristes.

 

 2. Le cadre légal national de la lutte contre le terrorisme

C’est sous l’impulsion du Conseil de sécurité que les Etats se retrouvent obligés de revoir leurs ordres juridiques internes de façon à les adapter à la lutte contre le terrorisme. Le Maroc à l’instar de nombreux pays a revu sa législation et deux textes importants qui au demeurant se complètent ont été adoptés : la loi sur le blanchiment de capitaux et la loi sur la lutte contre le terrorisme[3].

 

 

Les Etats sont tenus au regard du droit international d’une double obligation :

         - l’obligation de diligence ou de vigilance, de ne rien faire qui pourrait favoriser ou promouvoir des actes terroristes ou les tolérer à l’encontre d’un autre Etat[4];

         - l’obligation de prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher et décourager sur son territoire des activités terroristes contre un autre Etat. 

 

Il est évident, que tous les Etats ne se soucient pas du respect de ces interdictions et obligations pourtant confirmées et réaffirmées.

 

II. Le dilemme de la lutte contre le terrorisme

Les institutions internationales ainsi que les Etats ne s’accordent pas tous sur la question du terrorisme et le problème est celui de la conciliation entre le respect des droits humains et la lutte contre le terrorisme.

 

1. Une pluralité de perceptions et de mesures à, l’égard du terrorisme

A l’échelle de la « communauté internationale », les perceptions et mesures des Etats envers le terrorisme sont diverses. Les perceptions nationales du terrorisme ne sont pas non plus uniformes et homogènes. Les intérêts en jeu y sont pour beaucoup. Les critères de désignation des listes d’individus ou organisations dites terroristes ne sont pas identiques. Les critères de l’ONU et de sa liste récapitulative[5], les critères de l’Union européenne, ceux de l’OCDE[6], ceux des Etats-Unis avec la liste d’exclusion des organisations terroristes[7].

 

Les modalités de traitement de la question terroriste ne sont pas non plus identiques ; négociation avec les terroristes ou passivité, criminalisation par la voie pénale ou guerre contre le terrorisme par la voie militaire, comme c’est le cas récemment avec la réponse aux évènements d’In Amenas[8].

 

La difficulté est celle d’une solution globale, uniforme et homogène en tant que réponse à la question du terrorisme. 

 

Avec la résolution 1373 du Conseil de sécurité, outre diverses autres conventions, trois grandes obligations sont mises à la charge des Etats :   

         - ne pas accorder d’asile aux terroristes ;

         - ne pas accorder le statut de réfugiés aux terroristes ;

         - contrôler les frontières.

 

2. La difficulté de la conciliation entre le respect des droits de l’homme et la lutte contre le terrorisme

 

La lutte contre le terrorisme, ne doit pas être un prétexte pour les violations des droits de l’homme, du droit international des droits de l’homme, de la présomption d’innocence, de l’interdiction de la torture, du respect du droit à la vie, de la prévention démesurée... Les mesures devant être prises par la Etats au titre de la prévention doivent rester raisonnables « s’efforcer de prendre les mesures raisonnables en vue de prévenir les infractions » Article 10, paragraphe 1 de la convention de Montréal de 1971.

 

Le problème est celui de l’équilibre entre la lutte contre le terrorisme, la protection de la sécurité des personnes et des biens et le respect des droits de l’homme...

 

Suite aux attentats du 11 septembre 2001, plusieurs Etats ont adopté dans la précipitation des mesures législatives considérées comme une menace grave pour les droits humains. Des mesures répressives aux antipodes des droits de l’homme. Le plein respect des droits humains pour tout un chacun, quel qu’il soit, est primordial.... La véritable sécurité réside dans le respect des droits...

 

Les restrictions éventuelles à certains droits, ne peuvent être que de par la loi, exceptionnelles et limitées dans le temps : liberté de circulation et de résidence, liberté de la presse, liberté d’expression et de réunion, secret de la correspondance... Outre les restrictions, les instruments internationaux de protection des droits de l’homme prévoient la possibilité de dérogation. Toutefois, il ne peut être dérogé à certains droits : traitements inhumains, cruel, dégradants, torture, droit à la vie... 

 

Considérations finales

La réponse au terrorisme, quel qu’il soit, ne saurait être cantonnée et limitée aux mesures législatives, policières, judiciaires, répressives... Le développement, l’aide au développement, l’éducation, sont essentiels pour lutter contre le terreau social du terrorisme. Il n’y a pas de sécurité sans développement, comme il n’y a pas de développement sans sécurité.

 

La lutte contre les discriminations, les injustices, l’exclusion, la marginalisation, le sous-développement, l’ignorance, la précarité économique et sociale participe au plus haut niveau à titre préventif dans la lutte contre le terrorisme.

 

Notons que les Etats, eux-mêmes, ne sont pas toujours au-dessus de tous soupçons. La théorie de la gestion par le chaos fait qu’il arrive que certains Etats se retrouvent être à l’origine de crises et problèmes pour légitimer des interventions militaires. Toute une doctrine a été écrite sur la question avec des témoignages au sujet de la manipulation et de la responsabilité de certains Etats dans des attentats, dans la formation de groupes... Or, l’Etat soucieux du droit ne peut se permettre d’agir en dehors, ni en violation de la légalité.

 

La torture, les peines et traitements inhumains ou dégradants sont hors la loi et ne peuvent être justifiés au motif de la lutte contre la torture. Les intérêts de la sécurité nationale dans un Etat donné ne peuvent être opposés, en droit, aux normes impératives. La partition de la « sécurité nationale » ne peut être jouée contre les droits de l’homme. L’interdiction est absolue. Or le droit à l’intégrité physique et le droit à la vie ont souvent été ignorés par les Etats. Ainsi, la démocratie se doit d’être consolidée et réaffirmée, notamment dans la lutte contre le terrorisme.

 

In fine, dès lors qu’il y a des victimes se pose la question de leur indemnisation. L’Etat a l’obligation d’assurer la protection des personnes et des biens et de faire respecter le droit et d’agir légalement. L’Etat peut être tenu pour responsable, suite à la défaillance de ses agents et services. Certains Etats ont prévu des fonds pour l’indemnisation des victimes du terrorisme et de leurs ayants droits. Le phénomène du recours au terrorisme n’est pas prêt de disparaître. C’est la raison pour laquelle il est recommandable de mettre en place une entité ad hoc chargée de penser une véritable stratégie de lutte contre le terrorisme aussi bien en amont qu’en aval, dans le respect des droits de l’homme, avec plan et programmes d’actions précis.

 

 

 

 

 

 

 

 



[1]Communication à la conférence organisée par l’OMDH sur « Les crimes terroristes et les droits de l’homme ». 5 mai 2013. Hôtel Golden Tulip Farah. Casablanca.

[2]Selon le Larousse, le terrorisme est un « Ensemble d’actes de violence (attentats, prises d’otages, etc.) commis par une organisation pour créer un climat d’insécurité, pour exercer un chantage sur un gouvernement, pour satisfaire une haine à l’égard d’une communauté, d’un pays, d’un système ». Marco Sassòli, avec la collaboration de Lindy Rouillard. « La définition du terrorisme et le droit international humanitaire ». Article in, Revue québécoise de droit international (Hors série). (2007). Pages 29 à 48. Les éléments bloquants pour la définition de la notion de terrorisme tiennent à la distinction entre « terrorisme » et « résistance ». 

[3]Bulletin officiel n° 5114, du 05 juin 2003. Dahir n° 1-03-140 du 26 rabii I 1424 (28 mai 2003) portant promulgation de la loi n° 03-03 relative à la lutte contre le terrorisme. Bulletin officiel n° 5522, du 3 mai 2007.Dahir n° 1-07-79 du 28 rabii I 1428 (17 avril 2007) portant promulgation de la loi n° 43-05 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux. Mimoun CHARQI«La lutte contre le blanchiment de capitaux au Maroc ». In https://charqi.blog4ever.com

Faut-il préciser que ces textes pris dans la précipitation gagneraient à être repris ?

[4]«Chaque Etat a le devoir de s’abstenir d’organiser et d’encourager des actes de guerre civile ou des actes de terrorisme sur le territoire d’un autre Etat, d’y aider ou d’y  participer ou de tolérer sur son territoire des activités organisées en vue de perpétrer de tels  actes, lorsque les actes mentionnés dans le présent paragraphe impliquent une menace ou un emploi de la force». A/Res. 2625(XXV), premier principe, paragraphe 9.

« Tous les Etats doivent aussi s’abstenir d’organiser, d’aider, de fomenter, de financer, d’encourager ou de tolérer des activités armées subversives ou terroristes destinées à changer par la violence le régime d’un autre Etat (...)». 3èmeprincipe, paragraphe 2.

[5]www.un.org/News/fr-press/docs/2012/CS10816.doc.htm

[6]http://www.oecd.org/fr/finances/assurances/34065616.pdf

[7]L'article 411 de la loi "USA PATRIOT" de 2001 (8 U.S.C. § 1182) habilite le secrétaire d'Etat américain à désigner, après consultation du ministre de la justice ou à sa demande, les organisations terroristes aux fins de l'immigration et à les inscrire sur la liste d'exclusion des organisations terroristes (TEL). Une telle désignation permet d'interdire aux étrangers ayant des relations avec les organisations figurant sur cette liste d'entrer aux Etats-Unis.

[8]Voir aussi les attentats de 1999, en Russie. www.geopolintel.fr/article236.html


13/12/2021
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CRIMINALITE, BIEN ETRE, DEVELOPPEMENT ET DEMOCRATIE

 

 

CRIMINALITE, BIEN ETRE, DEVELOPPEMENT ET DEMOCRATIE[1].

                                                                                                       Pr. Dr. Mimoun CHARQI

                                                                                                       Charqi1@yahoo.fr

 

 

Cette communication est une réflexion, non pas sous l’angle de la criminologie, mais à l’aune de l’analyse sociopolitique. Quel rapport peut-il y avoir entre la criminalité, le bien être des individus, le développement et la démocratie ? 

 

Diverses pistes de recherche et réflexion, sous forme de propositions et hypothèses, seraient à même d’amorcer un débat afin de mieux comprendre certaines des raisons qui poussent à la croissance et au développement des différentes formes de criminalités, dont celle terroriste et partant de connaître de ce qu’il faudrait pour la réduction de la criminalité (III), au sens large du terme. Aussi, avant d’aborder les politiques et stratégies de lutte contre la criminalité (II), voyons ce qu’il en est des significations de la criminalité (I).

 

Titre 1. SIGNIFICATIONS DE LA CRIMINALITE                                                        

Les significations de la criminalité sont multiples voire antinomiques. Multiples, car plurielles, selon les types d’actes d’infractions, et antinomiques selon les institutions ou organisations.

 

1. Significations, légitimités et légalités plurielles de la criminalité 

 

1.1. Une criminalité plurielle et diversifiée

La criminalité est une notion fourre-tout, où l’on retrouve des actes criminels divers, sans commune parenté entre eux. Il en est ainsi, car le droit en donne une définition large. Pour en savoir un peu plus, sur les différentes catégories de crimes, il faut rechercher la famille à laquelle chaque crime appartient… Et de distinguer la criminalité financière (les détournements, les abus de biens sociaux, les dilapidations de deniers publics, le blanchiment, les trafics illégaux…), de la criminalité terroriste (assassinats, meurtres, enlèvements, viols, rapts…).

 

1.2. Une criminalitéévolutive

Notons que l’acte criminel se définit par rapport au droit. C’est le droit, étatique ou interétatique qui jugent et qualifient tel ou tel acte comme étant un acte criminel. D’ailleurs, ce qui est considéré, aujourd’hui, comme illégal, délictueux ou criminel, peut demain être légalisé et inversement. Pour autant, il arrive que ce qui est considéré et qualifié de criminel pour les uns ne soit pas ainsi vu par les autres. La légitimité des uns ne s’apparente pas à celles des autres. « Je considérai le vol comme légitime, dans la tribu des salauds », écrit Mohamed Choukri dans « le pain nu ».

 

3. Des légitimités et légalités plurielles

A titre d’exemple, le droit de la mafia ne considère pas comme criminels les contrats et autres actes de trafic ou assassinats. La mafia ayant son propre droit et ses propres règles. Il en va, assurément ainsi, également, dans les conflits armés où s’affrontent occupants et résistants. Ainsi, les résistants français étaient-ils considérés par les allemands, lors de la seconde guerre mondiale, comme des terroristes et, à ce titre, jugés comme des criminels, alors que les français les considéraient comme des héros et libérateurs. Pourtant, ces mêmes français considéraient, quasi au même moment, les résistants, marocains et autres, à la colonisation comme des rebelles, des terroristes et des criminels.

 

2. Significations, légitimités et légalités antinomiques de la criminalité

 

2.1. Légalités et légitimités antinomiques de l’acte criminel

Chacun, de son point de vue, va légitimer ou chercher à légitimer l’acte criminel ou la répression contre l’acte criminel. Le pouvoir, en place, s’occupera rarement de savoir, de chercher à comprendre et de prévenir les actes criminels. Les autorités étatiques semblent dépassées par les avalanches d’actes criminels. Il arrive même qu’elles versent elles-mêmes dans des actes répressifs illégaux, à la limite de l’illégalité voire criminels eux-mêmes. A titre d’illustration, l’emploi d’armes chimiques de destructions massives, (Ypérite, phosgène et chloropicrine), au demeurant prohibées par le droit international, par l’Espagne et la France, contre le Rif et les populations rifaines, pour venir à bout de l’Emir Abdelkrim, lors de la guerre du Rif, entre 1921 et 1926.

 

2.2. Robin des bois et les out law

Le détenteur du pouvoir assimile, de son point de vue, toute personne qui conteste sa stabilité et son bien-être économique, social et politique comme un criminel. Celui qui détient le pouvoir, généralement, ne se soucie pas de savoir ce qu’il en est du « bien-être » de celui en difficulté. Quels qu’ils soient, les actes criminels sont souvent animés par la recherche d’un meilleur être, d’un devenir meilleur, d’une meilleure vie, voire du maintien d’un statu quo associé aux privilèges qui en résultent. Robin des bois est un out law, un hors la loi, un criminel, au regard du droit, du shérif de Nottingham… Pourtant, lui-même, ses amis et le petit peuple qu’il défend ne le considèrent pas ainsi.

 

2.3. Ordres mafieux et terroristes contre ordres étatiques

Si la criminalité, le crime, est un concept clair, aux yeux des Etats. Si, à quelque chose près, l’ensemble des Etats peuvent s’accorder sur la signification de ce qu’il faut entendre par le crime, ou la criminalité, toujours est-il que cette signification étatique ou interétatique peut se retrouver concurrencée, voire remise en cause par d’autres institutions que les Etats. Il en est ainsi de la mafia, il en est ainsi, également, des divers groupes « terroristes », de par le monde. Al Qaida, le GSPC, le Polisario… Tandis que les uns considèrent tel acte comme illégal, les autres le voient, de leur point de vue légitime, si ce n’est « légal », au regard de leurs « ordres » respectifs. L’Etat n’a plus le monopole quant à la production de normes de conduite, quant à ce qu’est l’ordre juridique, quant à ce qu’il devrait être ; des « ordres juridiques » s’affrontent ainsi entre eux.

 

Titre 2. POLITIQUES ET STRATEGIES DE LUTTE CONTRE LA CRIMINALITE

Les politiques et stratégies de lutte contre les actes criminels peuvent être distinguées en connaissance, prévention et répression. L’intérêt de la connaissance, de la prévention et de stratégies appropriées pour la maîtrise du fait criminel n’est plus à démontrer, et ceci, d’autant plus que les politiques et stratégies du tout répressif ont montré leurs limites, leurs caractères néfastes voire contreproductifs… 

 

1. Les limites des politiques répressives

1.1. Les limites de la sécurité par la répression

L’ordre ne peut à long terme, de façon durable, être assuré à coup de bâton, ou pire à coup de fusil, par les obus et le sang… Prenons le cas du problème palestinien, par exemple : les différentes parties en présence pensent pouvoir régler leurs litiges par la violence et la violence en réaction. Une spirale criminelle s’installe, chaque fois plus forte. Le point de non-retour risque d’être rapidement franchit, s’il ne l’est déjà. Lorsqu’on recourt à la force pour régler une situation donnée, c’est que l’on a déjà perdu et loin de régler quoi que ce soit le problème ne se retrouve qu’aggravé.

 

Le tout sécuritaire est aux antipodes de la sécurité. La sécurité ne saurait se réduire à la répression tout azimut, sans discernement, disproportionnée… La sécurité ne peut pas être à sens unique. Elle doit être globale ou ne sera pas. Elle doit être portée par la société dans son ensemble et à son profit. Le bien-être, le développement et la démocratie ne peuvent non plus être réservés à une élite, à des catégories… L’exclusion, le défaut d’insertion sociale et autres ne peuvent que nourrir les infractions, délinquances et criminalités. 

 

1.2. Le caractère néfaste et contreproductif du tout répressif

La répression, à elle seule, ne suffit pas. Elle peut être même contre-productive avec des effets pervers néfastes et contraires au but recherché. Prenons à titre d’illustration, un cas fort éloquent, celui de la « guerre d’Algérie ». L’histoire est là qui nous enseigne comment le FLN a réussi à piéger l’armée française. Suite aux crimes terroristes commis par le FLN à l’encontre des populations françaises d’Algérie, l’armée française s’est vengée, en retour, de façon aveugle, par des crimes à l’encontre des populations autochtones sans chercher à savoir qui était coupable ou pas. Dix français de souche avaient été tués, eh bien cent autochtones seraient massacrés en retour ! C’est ainsi, qu’une population qui n’était guère acquise, au début, au FLN, se retrouva devoir choisir son camp avec le FLN et pour l’indépendance de l’Algérie. On ne répond pas à la barbarie, par la barbarie, par la répression massive et aveugle, mais en toute intelligence, dans le respect du droit, des droits de l’homme et de la personne humaine. Un innocent condamné devient dangereux pour la société.

 

2. L’intérêt de la connaissance, de la prévention et de stratégies appropriées

2.1. L’intérêt de la criminologie

La maîtrise de la criminalité passe dès lors par des centres spécialisés d’étude stratégiques, des approches scientifiques réfléchies, une connaissance, des décisions rationnelles… Ce n’est pas à des criminologues que je ferai l’affront de dire l’intérêt de la criminologie. Néanmoins, notons qu’en dépit de l’intérêt accordé par les pays développés à la connaissance, à la compréhension des motifs criminels, ces pays n’arrivent pas à mettre fin aux infractions. Il est évident que l’éradication de la criminalité est une illusion. Cependant, à défaut de pouvoir l’éradiquer, toujours est-il qu’elle peut être contenue, réduite, prévenue… La prévention suppose une bonne connaissance de l’acte criminel, de ce qui le motive, de ses modes opératoires… 

 

2.2. Criminalités et frustrations

Les raisons de la criminalité, des criminalités devrait-on dire, sont complexes, plurielles, diversifiées… Cependant, il semble que toutes les formes ou types de criminalités aient quelque chose en commun : la « frustration de quelque chose ». Aux antipodes des frustrations on retrouve le bien être.

 

2.3. Criminalités et changements sociaux

Quelle relation entre « criminalité » et « changements sociaux » ? Le problème c’est que les différents changements sociaux, l’évolution des rapports sociaux, ne tient pas toujours compte du souci de la nécessaire réduction de la criminalité. Les visions, choix et stratégies pensées et décidées ne tiennent pas toujours compte du paramètre de la lutte contre la criminalité.

 

2.4. Réduire la criminalité, à défaut de pouvoir l’éradiquer

Le regard jeté sur nos sociétés permet de relever une progression assez alarmante des différentes formes de criminalités. Selon les sociétés, de nouvelles formes de criminalités voient le jour, d’autres s’estompent-t-elles pour autant ? Cela n’est pas si sûr ! Une simple lecture des organes de presse, permet de se rendre compte encore que de façon fort imparfaite de l’état des lieux… Au Maroc, par exemple, nous n’en sommes plus aux formes classiques de criminalités, puisque que le terrorisme kamikaze lui-même a fait son apparition ces dernières années, encore que dans des proportions fort limitées par rapport à d’autres pays dont le voisin algérien.

 

La cité idéale, où la criminalité serait réduite à son minimum, théoriquement, ne semble pas inaccessible. En réduisant les causes à même de pousser aux actes criminels, en agissant à titre préventif, ne pourrait-on pas réduire la criminalité ? Tenir compte du nécessaire bien-être de tous les individus, du nécessaire développement pour tous les humains et de la démocratie pour tous et contre tous semble une condition sine qua non pour la réduction de la criminalité.

 

Titre 3. LES CONDITIONS DE LA RÉDUCTION DE LA CRIMINALITÉ

La sagesse fait souvent défaut, l’intelligence encore davantage dans la conduite des politiques de gestion des actes criminels terroristes. Bien être, développement et démocratie semblent des conditions importantes pour la réduction de la criminalité.

 

1. Le bien être contre le crime

Le bien être peut-il être un palliatif au crime ? Certains crimes sont commis avec motif de recherche du « bien être », bien être matériel, social, économique ou autre. Cela ne suppose-t-il pas, dès lors, que le bien-être de l’individu, et de la somme des individus, peut être un paravent à la criminalité ? Si celui qui n’a rien, car exclu, et marginalisé ne risque rien à perdre, en est-il de même de celui qui est intégré, qui est reconnu, qui a sa place dans la société ? Seul le mal être, le sentiment d’exclusion, la frustration, le sentiment d’injustice, voire la cupidité, pousseront, à priori, au crime.

 

2. Le développement contre le crime

Le développement peut-il être un paravent au crime ? Une société sous développée apparaît comme le terreau fertile de bien des formes de criminalités. On pourra, certes, rétorquer que bien des sociétés développées connaissent, voire subissent diverses formes de criminalités ! Dès lors l’assertion serait-elle contredite ? Aucunement, car les sociétés développées en question nourrissent en leur sein diverses formes et îlots de sous-développement, d’exclusion, de marginalisation, d’injustices… Pour opposer le développement, efficacement, aux criminalités, il faudrait dès lors que le développement soit juste et égalitaire. Encore que, le sujet se complique énormément avec la globalisation, la transnationalisation des différents rapports sociaux à l’échelle mondiale. 

 

3. La démocratie contre le crime

La démocratie peut-elle être un remède à la criminalité ? Le problème c’est que la démocratie se trouve avoir des significations plurielles, sans qu’elles s’accordent entre elles. Au nom de la démocratie et de la liberté, est-il indiqué d’intervenir afin d’imposer, par les armes, le feu et le sang, démocratie, liberté et droits de l’homme ? C’est en tout cas, ce que sont quelque unes des raisons avancées pour les interventions militaires en Afghanistan, en Irak, en Libye… On se rend compte que l’Europe, les Etats-Unis, et le monde dit développé d’une façon générale, sont loin de maîtriser l’appréciation stratégique de ce qu’il faut faire ou ne pas faire. Les attentats n’ont jamais été plus importants depuis les interventions militaires occidentales en Afghanistan, en Irak… L’usage de la force répressive fait appel en retour et cultive la réaction par la force, par le terrorisme, souvent aveugle, incontrôlé…

 

4. Le droit contre la criminalité

Il n’est guère indiqué de combattre le terrorisme, les extrémistes et la violence par les mêmes moyens. Les moyens devant être utilisés doivent être des moyens légaux respectueux des grands principes juridiques. Autrement, l’échec des institutions et du droit serait consommé. En aucun cas les actes criminels ne devraient renforcer la répression et les limites aux libertés, ni servir de prétexte aux abus. Cela devrait faire réfléchir et agir avec fermeté, dans le respect du droit et des droits et par la mise en place de plus de justice économique et sociale, de démocratie, de respect de la dignité de la personne humaine.

 

Considérations finales

Le Maroc à l’instar de bien des pays, encore que fort relativement, voit se développer la criminalité. Cependant, les gens aspirent à vivre en paix. Or, la paix est globale, elle est civile et politique, elle est aussi économique, sociale, culturelle, religieuse… Si la parade aux terrorismes ne peut pas être seulement locale, à l’ère de la globalisation, il n’en reste pas moins que chacun peut agir pour ce qui le concerne. 

 

La Maroc est-il fragile "en raison de la pauvreté qui y sévit" ? De la "conjoncture internationale" et de ses positions ? En tous cas c’est ce que d’aucuns affirment, sans avoir vraiment tort ! La misère, les inégalités criardes, la pauvreté, le chômage, l’analphabétisme devraient être éradiqués si l’on veut réellement combattre toutes formes d’extrémismes. La Solidarité et la tolérance devraient être érigées en principes constitutionnels. La Solidarité avec un grand "S", qui s’identifie à davantage de justice économique et sociale.

 

L’Etat doit faire preuve d’intelligence, de sagesse, et d’efforts sur soi. Ceux qui commettent des crimes ou participent à leurs exécutions, en connaissance de cause, en complices, doivent répondre de leurs actes, devant la justice, mais dans le respect du droit. Lorsque l’Etat parvient à le faire, c’est là une victoire sur les actes criminels et l’Etat concerné peut s’enorgueillir de faire partie des nations de droit, engagées réellement dans le processus démocratique. En aucun cas, les crimes commis ne devraient être le prétexte à des abus et violations des règles de droits élémentaires, que ce soit à l’échelle internationale ou au niveau des Etats. Concomitamment, les pays du Sud doivent s’engager dans de larges chantiers, de grands travaux productifs de richesses et de répartition de bien-être économique, social et autres. 

 

 



[1]Communication au XIe Colloque de l’Association internationale des criminologues de langue française. Délinquances et changements sociaux, des modes de vie et des pratiques d’intervention. Dialogue Sud - Nord. Rabat, Université Mohamed V- Agdal. 11-13 mai 2008.


30/11/2021
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AUTODETERMINATION, DROIT DES PEUPLES, INDEPENDANCES ET AUTONOMIES ?

AUTODETERMINATION, DROIT DES PEUPLES, INDEPENDANCES ET AUTONOMIES ?

 

Le régime politique militaire algérien, depuis près d’un demi-siècle, n’a eu cesse de contrer le Maroc dans la récupération de son intégrité territoriale, dans le cadre de ses frontières authentiques, en ce qui concerne le Sahara occidental marocain et même les villes de Sebta, Melilia, ainsi que les iles et ilots avoisinants. L’attitude hostile de l’Etat algérien s’est traduit par un soutien actif, militaire, financier et diplomatique du Polisario, sur le terrain, et dans les enceintes institutionnelles internationales. 

 

Tout en usant d’un double langage, l’Etat algérien argue que son soutien au Polisario est un soutien de principe basé sur le droit à l’autodétermination issu de la règle de jus cogens du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Le Maroc durant plusieurs décennies s’était abstenu de jouer le même jeu que l’Algérie. 

 

Néanmoins, récemment, à l’occasion d’une sortie habituelle du représentant algérien, au sein du mouvement des non-alignés, sur le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui, le représentant du Maroc a fini par faire remarquer au représentant algérien que si l’Algérie tenait tant au respect du droit à l’autodétermination, il fallait commencer par l’appliquer au peuple Kabyle, qui après avoir réclamé en vain l’autonomie de la Kabylie, s’est engagé dans la voie de l’autodétermination de la Kabylie. Comme on pouvait s’y attendre, la réaction de l’Etat algérien ne s’est pas faite attendre, au point de considérer la déclaration du représentant marocain sur la Kabylie comme une déclaration de guerre.

 

J’ai eu l’occasion de discuter avec Ferhat MHENNI, président du Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie, il y a déjà quelques années de cela, lors d’un colloque sur l’Amazighité à Barcelone. Las, entièrement las et fatigués de ne pouvoir être entendus sur la revendication quant à l’autonomie de la région de la Kabylie, forcément, les gens se radicalisent et se mettent à réclamer ni plus ni moins que l’indépendance... Alors que je soutenais que la solution pour régler les problèmes issus de la décolonisation dans Tamazgha résidait dans l’autonomie des régions et une confédération des Etats dans leurs frontières actuelles, MHENNI était déjà partisan de l’indépendance de la Kabylie.

 

Néanmoins, souvent, les concepts, leurs significations, intérêts et utilités ne sont pas toujours maitrisés. Pour s’en rendre compte, il n’y a qu’à voir ou écouter ce qui se publie ici ou là, notamment sur les réseaux sociaux. Ce qui vaut pour le Sahara occidental marocain vaut pour la Kabylie. Le Maroc n’a jamais soutenu et ne peut pas soutenir une indépendance de la Kabylie, pour les raisons que nous verrons, ci-après, à moins de se départir de sa sagesse et de sa raison légale habituelles et de verser dans le politique à l’instar du régime algérien. 


L'histoire des peuples est jalonnée de difficultés, de guerres, d'oppressions, de colonisations, de luttes de libérations, etc. Nombre de pays se sont retrouvés colonisés, au demeurant avec la bénédiction du droit international, avant d'utiliser ce même droit international pour revendiquer leurs indépendances, un droit à la décolonisation sur la base du principe des droits des peuples. Toujours est-il que les « décolonisations » et « indépendances » n'ont pas toujours été, loin s'en faut, la consécration effective des droits des peuples. Le Maroc fait partie de ces pays ayant subi des invasions, colonisations et autres « protectorats » ; des agressions qui ont conduit à la partition de son territoire entre les puissances européennes. 


Le recouvrement progressif de l'intégrité territoriale du Maroc se trouve en bute, dans le cas du Sahara anciennement colonisé par l'Espagne, avec une contestation orchestrée par le voisin algérien, à travers un front sécessionniste : le Polisario. Les arguments développés et soutenus par la diplomatie algérienne semblent, à priori et en apparence, trouver leurs fondements sur des principes de droit international. Mais qu'en est-il réellement ? D’autant plus que l’Etat algérien refuse à la Kabylie ce qu’elle revendique pour son Polisario. L'analyse permet de se rendre compte que la légitimité légaliste, issue du droit international, est plutôt du côté marocain. 

 

Pour séparer le bon grain de l’ivraie, il sied de revenir sur ce que sont les différents concepts au regard du droit et de la jurisprudence, avant d’en tirer les conclusions.

 

I. LES DROITS DES PEUPLES ET L’AUTODETERMINATION

Qu'est-ce que les droits des peuples et qu'est ce qu'ils ne sont pas ? De principe politique, à ses origines, le droit des peuples est passé à devenir une règle juridique qui, au demeurant, fait l'objet de bien des manipulations, alors même que la signification juridique, stricto sensu, ne prête à aucune confusion.


1. Le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes : évolution, interprétation et signification
Le droit international public contemporain s'est fait sur la base du consentement des Etats et l'objectif de recherche de la paix et de la sécurité internationale. Les règles morales, politiques et autres sont venues, au fur et à mesure, conforter le développement et l'évolution du droit international public. 

 

Sur la base du principe du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, les pays colonisés ont pu accéder à l'indépendance. La résolution 1514 (XV) de l'Assemblée Générale des Nations Unies est venue consacrer le droit à la décolonisation. Mais déjà en 1945, la charte de l'Organisation des Nations Unies, à son article 1er, précise ce qu'il en est de l'un des buts des Nations Unies : « développer, entre les Nations, les relations amicales fondées sur le respect du principe de l'égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d'eux-mêmes et prendre toutes autres mesures propres à consolider la paix du monde ». 

 

Il faut dire que le droit international public, aussi désigné par le droit des gens, ne s'appliquait, à ses débuts, qu'entre nations dites « civilisées ». Les pays colonisés vont reprendre et revendiquer les règles et principes du droit international public pour leurs décolonisations. Notons que souvent il y a une « confusion » parfois par erreur, parfois à dessein, entre le principe du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et la souveraineté ou l'indépendance politique des Etats.

 

Le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes peut être présenté de deux façons :
- soit comme un principe ou règle démocratique à travers lequel les populations concernées s'expriment ;

- soit comme un principe révolutionnaire selon lequel les populations ou peuples concernés expriment la détermination de leur statut politique. 

 

Ainsi, le principe du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes donne lieu et laisse la place à des interprétations souvent erronées, où le politique l'emporte sur la règle juridique proprement dite. Mais, tout comme, sur le plan interne, la politique n'est pas le droit, la politique internationale ou étrangère ne sont pas et ne se confondent pas, au niveau international, avec le droit international.


2. Les populations concernés par les droits des peuples

Les peuples concernés, par la règle du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et la règle du droit des peuples à la libre détermination, sont ceux soumis, selon les termes de la résolution 2625 (XXV), de l'Assemblée Générale des Nations Unies, à une subjugation, à une domination ou à une exploitation étrangère. C'est le cas, lorsqu'il y a exercice au sein d'un Etat d'un « régime juridique discriminatoire » à l'égard d'une partie de la population ; traditionnellement, les peuples et territoires concernés sont ceux sous tutelle ou non autonomes. Le droit international contemporain a strictement limité l'application des droits des peuples à l'indépendance aux peuples colonisés. 


3. Les nations et peuples

Les concepts de « nation » et « peuple » sont à la fois imprécis et controversés. Ils peuvent, tantôt se confondre, tantôt se distinguer. Dans une nation peuvent figurer plusieurs peuples, de même qu'un même peuple peut se retrouver sur plusieurs nations. La définition des notions de « nation » et « peuple » sont particulièrement difficiles. Ainsi, il a été avancé que la notion de « peuple » s'apparente à des « groupements ethniques habitant un territoire nettement limité ».


4. Les indépendances au détriment des droits des peuples

Souvent, le droit des peuples à la libre et authentique autodétermination a été tronqué et mis de côté dès lors que le territoire et les populations concernées accédaient à une « indépendance », souvent factice, bien souvent antinomique même aux droits des peuples et à leurs volontés confisquées. Les relations internationales, l'histoire des institutions internationales ne sont que ce que les Etats en font. Le droit international public n'est que ce que les Etats veulent qu'il soit. Bien souvent, les interprétations, les lectures, les applications qui se font de la règle de droit sont commandées par les intérêts politiques, économiques, financiers, stratégiques et autres.


5. La règle des décolonisations sans référendum

Le droit des peuples a souvent été exercé sous la forme d'un compromis ou accord entre le mouvement de libération nationale et l'Etat anciennement colonisateur. Il convient de noter que la théorie du référendum n'a jamais été la règle, dans l'histoire des relations internationales et la pratique du droit international général. Dernièrement, Hong Kong et Macao ont fait l'objet d'une restitution à la Chine sans que les populations locales soient consultées, et sans que personne ne s'en offusque.


6. L'illégalité des sécessions : l'absence d'un droit à la sécession

Nombre d'Etats font des règles juridiques internationales des usages politiques et idéologiques qui ne s'accordent aucunement avec la réalité du droit international public. Ainsi, une mauvaise interprétation du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes peut être lourde de conséquence, dans la mesure où elle remettrait en cause l'unité nationale et l'intégrité territoriale des Etats. 

 

D'ailleurs, ce n'est pas sans raison si la Résolution 2625 (XXV), de l'Assemblée Générale des Nations Unies, précise, pour clarifier la signification du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, que : « Rien dans les paragraphes précédents ne sera interprété comme autorisant ou encourageant une action quelle qu'elle soit qui démembrerait ou menacerait, totalement ou partiellement, l'intégrité territoriale ou l'unité politique de tout Etat souverain et indépendant se conduisant conformément au principe de l'égalité de droit et du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes énoncé ci-dessus et doté ainsi d'un gouvernement représentant l'ensemble du peuple appartenant au territoire sans distinction de race de croyance ou de couleur ».


7. L’autodétermination et la souveraineté nationale

La doctrine soviétique du droit international public, représentée par Grigory I. TUNKIN, rappellait ce qu'il en est de la signification, de l'évolution et de l'importance du principe d'autodétermination des peuples. A l'origine, lors des périodes des « révolutions bourgeoises », ce principe s'apparente au « principe des nationalités ». L'union soviétique a contribué à la consécration du « principe d'autodétermination des nations » par le droit international public. Lorsque la Charte de l'Organisation des Nations Unies, à ses articles 1 et 55, fait mention de l'autodétermination, c'est dans le respect de la souveraineté nationale. 


8. Les droits des peuples : d'une règle d'exception à une règle générale

Dès la fin de la 1ère guerre mondiale, le principe du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes apparaît dans le droit international comme règle d'exception. Avec la fin de la 2eguerre mondiale et la signature de la Charte de l'Organisation des Nations Unies, le principe du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes est traduit en règle générale qui, depuis, ne va pas cesser d'être consacrée pas des instruments Internationaux divers. Le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, est même consacré comme le premier des droits de l'homme.


A la fois dans les pactes internationaux relatifs aux droits de l'homme, en l'occurrence : le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, ainsi que le pacte international relatif aux droits civils et politiques, le principe du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes figure en bonne place, puisque les articles 1er de chacun de ces deux instruments internationaux en font mention.


9. Le droit au plébiscite ?

Pour l'Organisation des Nations Unies, la notion de « peuple » concerne « les populations de tous pays, de tous les territoires dépendants, non autonomes ou sous tutelle ». Mais qu'en est-il du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et du « droit au plébiscite » au regard de la jurisprudence internationale ? 

 

Une affaire célèbre dans les annales de la Société des Nations est celle des îles d'Aland. Ces dernières qui étaient sous souveraineté Suédoise avaient été conquises par Alexandre 1eren même temps que la Finlande. Après la fin de la première guerre mondiale lorsque la Finlande retrouva son indépendance, les îles d'Aland souhaitèrent s'unir, en vertu du « principe des nationalités », avec la Suède, en réclamant un plébiscite. La Finlande refusa et l'affaire fut portée devant le Conseil de la Société des Nations qui se prononça en faveur de la Finlande, le 24 juin 1921. 

 

La thèse défendue par la Société des Nations est qu'il « appartient exclusivement à la souveraineté de tout Etat définitivement constitué d'accorder ou de refuser à une fraction de sa population le droit de déterminer de son propre sort politique par la voie d'un plébiscite ou un autre moyen». 


10. L'exception des plébiscites de décolonisation

Dans l'histoire des relations internationales, les seuls cas de plébiscites, résultant du droit international conventionnel se référant à la décolonisation de territoires sous tutelles, concernent le Togo, le Cameroun, le Samoa occidental, et le Ruanda-Urundi. Quand on sait ce qu'est le nombre d'Etats ayant accédé à l'indépendance, le pourcentage des Etats dans lesquels il a été fait recours au plébiscite est dès lors exceptionnel et infime. Dès lors, il n'y a pas, en droit international public, une règle ou un principe consacré d'un droit au plébiscite de décolonisation.


11. La Déclaration sur l'octroi de l'indépendance aux peuples colonisés

L'Assemblée Générale des Nations Unies, par sa résolution N° 1514 (XV), du 14 décembre 1960, a adopté à l'unanimité des Etats avec neuf abstentions la déclaration sur l'octroi de l'indépendance aux peuples coloniaux. Or, il convient de noter que cette Déclaration, qui confirme une fois de plus le principe du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, précise à son paragraphe e) que : « Toute tentative visant à détruire partiellement ou totalement l'unité nationale et l'intégrité territoriale d'un pays est incompatible avec les buts et les principes de la Charte des Nations Unies ». Ainsi, toutes actions et manœuvres visent à aboutir à la sécession, d'une partie d'un territoire de l'ensemble du territoire national est nulle et non avenue car tout simplement illégale.


12. Le droit des peuples et le jus cogens

De principe politique directeur, le principe du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes est devenu, au fil du temps, un principe juridique, une règle proprement dite et, ce qui plus est, de jus cogens. Le droit international comporte des règles dites de « jus cogens », des règles impératives auxquelles il ne peut être dérogé. C'est le cas du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Encore que d'aucuns lui contestent ce caractère. Les autres règles de jus cogens étant : L'interdiction du recours à la guerre et à la force, l'égalité souveraine des Etats, la non immixtion dans les affaires internes, l'adage Pacta Sunt Servanda, selon lequel les pactes doivent être respectés, la liberté de la haute mer, etc.

 

II. LA JURISPRUDENCE ET LE DROIT INTERNATIONAL

Si la jurisprudence internationale permet, dans le cas de l'avis juridique de la Cour internationale de Justice de dégager une opinion, au sujet de la légitimité marocaine sur le Sahara, le droit international, quant à lui, à l'occasion d'affaires célèbres dans les annales de l'histoire des relations et institutions internationales consacre des principes et règles de conduite qui servent et appuient la position marocaine dans le dossier du Sahara.


1. La C.I.J, le Sahara et les droits des peuples

Lors de la consultation de la Cour internationale de justice, en 1975, au sujet du Sahara, cette dernière après avoir reconnu qu'il y avait des liens d'allégeance entre les populations et tribus du Sahara avec les Sultans marocains et que le Sahara n'était pas « terra nullius », terre sans maître, s'est prononcée en faveur de la consultation des populations concernées, sous forme de référendum, afin qu'elles expriment leurs opinions. 


Or, deux grandes remarques peuvent être faites à ce sujet : Primo, les avis consultatifs de la Cour internationale de justice contrairement aux arrêts ne revêtent pas un caractère obligatoire. Secundo, la règle générale, issue du droit international, en matière de décolonisations, veut que les peuples concernés ne sont pas associés, par référendum, à se prononcer sur leur devenir. 


Il faut noter cependant que, depuis, l'Assemblée Générale des Nations Unies a réaffirmé, dans plusieurs Résolutions, « le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination par l'expression libre et authentique de sa volonté ». Notons que, le Maroc ne dit pas autre chose si ce n'est qu'il veille à éviter les manipulations et récupérations qui vont à l'encontre même de la libre autodétermination. Ce principe, d'ailleurs, ne concerne pas seulement le Sahara mais tous les peuples et populations et provient d'un souci de libre exercice de gestion démocratique des sociétés. 

2. La remise en cause du référendum sur Gibraltar

Un cas assez atypique convient d'être mentionné dans l'histoire des relations internationales et du droit international : celui de Gibraltar. Avec le traité d'Utrecht, signé en 1713, l'Espagne concédait à la grande Bretagne, la possession de Gibraltar, sous conditions. Devenue colonie de la grande Bretagne, en 1830, le statut de Gibraltar va évoluer progressivement avec une population provenant de l'extérieur. Depuis, Gibraltar fait l'objet d'un litige entre l'Espagne qui souhaite son recouvrement et la Grande Bretagne qui s'attache à sa « souveraineté » sur le rocher. C'est ainsi qu'en 1967, la Grande Bretagne a annoncé un référendum sur Gibraltar. Rapidement, le projet de référendum fut condamné par le « Comité des 24 », ou Comité de la décolonisation, qui le considère comme contraire aux différentes Résolutions de l'Assemblée Générale des Nations Unies.


Néanmoins, ce référendum a lieu le 12 septembre 1967, et il en ressort que 99 % des concernés sont pour le maintien de la relation avec la Grande Bretagne et s'opposent à un retour de Gibraltar à l'Espagne. 


3. La contestation du référendum et de l'indépendance de Chypre

Dans les relations internationales, un autre cas mérite d'être rappelé. Celui de Chypre. La colonisation de Chypre intervient comme suite à un Traité entre l'Empire Ottoman et la Grande Bretagne, le 4 juin 1878. Avec la 1ère guerre mondiale, Chypre est annexée par la Grande Bretagne, puis, ensuite, devient une colonie Britannique en 1925. Chypre n'a eu cesse, depuis la fin de la 1ère guerre mondiale, de réclamer l'application du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. Un référendum est même organisé, par Monseigneur Makarios, le 15 janvier 1950, avec comme résultat 95,7 % des voix en faveur d'une union de l'île avec la Grèce. Mais la Grande Bretagne se refuse toujours d'y donner suite, ce qui conduit la Grèce, à saisir l'Organisation des Nations Unies, le 16 août 1954, en réclamant le droit à la libre détermination. 

Alors que la Grèce fonde son recours à l'Organisation des Nations Unies sur l'article 1er paragraphe 2 de la charte des Nations Unies, la Grande Bretagne, quant à elle, se base pour ses objections sur l'article 2, paragraphe 7, de la même Charte des Nations Unis, sur le principe du « domaine réservé des Etats », sur » la stabilité des frontières », etc. Depuis 1955, la Turquie s'est invitée au conflit, ce qui complique la solution. L'indépendance de Chypre, avec les traités de Zürich et de Londres, en 1959, divise la république Chypriote entre grec et turcs avec une force de casques bleus d'interposition. Depuis, la proclamation d'un Etat fédéré turc, en 1975, avec la république turque de Chypre Nord, en 1983, a été déclarée par le Conseil de Sécurité comme « légalement nulle et non avenue » en invitant les différents Etats à ne pas reconnaître ce qui est considéré comme un « Etat fantoche ».

4. La condamnation de la sécession et de l'indépendance du Biafra

Un 3ecas, assez particulier aussi, mérite d'être rappelé : celui du Biafra. La région orientale de la fédération du Nigeria proclama, le 30 mai 1967, la sécession et l'indépendance sous le nom de Biafra. Néanmoins, le 12 janvier 1970, les troupes fédérales du Nigeria obligèrent le Biafra à la capitulation. L'Organisation de l'Unité Africaine, dès le début, s'est déclarée contre la sécession du Biafra, afin d'éviter un précédent préjudiciable à l'unité des Etats Africains nouvellement indépendants. L'Organisation de l'Unité Africaine affirmant que le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes n'était plus applicable en ce qui concerne les populations d'un Etat constitué. L'Organisation des Nations Unies, quant à elle, s'est abstenue de toute intervention dans le conflit du Biafra, excepté l'envoi de vivres et de médicaments aux populations sinistrées. Le Secrétaire Général de l'Organisation des Nations Unies de l'époque, M. U. THANT, devait affirmer que : « l'Organisation des Nations Unies n'a jamais accepté, n'accepte et n'acceptera jamais, je pense, le principe de la sécession d'une partie d'un Etat».

 

CONSIDÉRATION FINALES


A la lumière de ce qui précède, au titre des considérations finales, divers points de conclusions peuvent être retenus.


1. Le dossier du Sahara occidental de même que celui de la Kabylie relèvent des affaires intérieures de leurs pays respectifs

La Kabylie ainsi que le Sahara occidental marocain ou du moins leurs populations respectives relèvent de l’Algérie ou du Maroc. Ces populations autochtones ne sont pas étrangères à l’Algérie ou au Maroc. Le domaine réservé des Etats se base sur leur souveraineté. 

 

C'est pourquoi l'article 2, paragraphe 7, de la Charte de l'Organisation des Nations Unies prévoit que : « Aucune disposition de la présente Charte n'autorise les Nations Unies à intervenir dans les affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d'un Etat, qui n'oblige les membres à soumettre des affaires de ce genre à une procédure de règlement aux termes de la présente charte (…) ». En conséquence, rien n'obligeait le Maroc à soumettre le dossier du Sahara à la « Communauté internationale » et de procéder à des visites d'explication de la position marocaine, de sa légitimité et des solutions envisagées, prenant ainsi à témoin la communauté internationale.

 

Sur la base du principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats membres, le Maroc s’était gardé de répondre à l’Etat algérien selon ses procédés. Mais, le droit international consacre aussi un autre principe, celui de la réciprocité dans les relations internationales. 


2. Le devoir de non-ingérence et de respect de l'intégrité territoriale des Etats

Conformément au principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats membres des Nations Unies, consacré par la Charte de l'Organisation des Nations Unies, le paragraphe f) de la résolution 1514 (XV) de l'Assemblée Générale précise que « Tous les Etats doivent observer fidèlement et strictement les dispositions de la Charte des Nations Unies, de la Déclaration universelle des droits de l'homme et de la présente Déclaration sur la base de l'égalité, de la non-ingérence dans les affaires intérieurs des Etats et du respect des droits souverains et de l'intégrité territoriale de tous les peuples ».

 
L'Assemblée générale des Nations Unies a fini par assimiler les « territoires non autonomes » aux « pays sous tutelle ». Par ailleurs, il est affirmé, à juste titre, qu'en droit international public, « le principe du respect de l'indépendance déjà acquise conduisent à la souveraineté totale (…) ». Il n'est pas admis d'indépendance sur et après indépendance. Dans le cas du Sahara, l'indépendance réclamée par le Polisario, et soutenue par l'Algérie, relève la sécession et non de la décolonisation. Au Sahara, la décolonisation, l'indépendance et le recouvrement de l'intégrité territoriale marocaines se sont fait après les accords de Madrid.

« La non-intervention dans les affaires internes des Etats est un principe fondamental du droit international qui se fonde sur la souveraineté de l'Etat, son droit à l'indépendance politique et à l'intégrité territoriale, et par conséquent sur le droit de chaque peuple d'avoir le régime de sa préférence et les gouvernants de son choix ». L'Algérie ne semble pas faire grand cas de cette règle internationale et, ce faisant, viole le droit international. En violant, cette règle, elle se retrouve dans la situation de l’arroseur arrosé, aujourd’hui par le biais de la Kabylie, demain via le M’zab, etc.


3. La primauté et la préférence de l'autonomie sur l'indépendance

Les indépendances, d'une façon générale, ont été bien loin de consacrer le principe du droit des peuples à l'autonomie et à disposer d'eux-mêmes. L'Assemblée générale des Nations Unies a eu l'occasion de recommander par sa Résolution N° 1064/XI, du 26 février 1957, au sujet du Tanganyika, du Cameroun, du Ruanda-Urundi et du Togolande, dans l'ordre, « l'autonomie » ou « l'indépendance », (…). Il faut noter, ici, que ce qui est privilégié c'est l'autonomie sur l'indépendance. Pour la simple raison que l'autonomie est un système de gouvernance qui se situe au-dessus des indépendances acquises après décolonisations.


Dans les quatre affaires précitées, l'Assemblée Générale des Nations Unies a recommandé l'autonomie avant l'indépendance. Cela signifie que, sur la base des standards internationaux en matière de droits de l'homme, de liberté et de démocratie, l'autonomie est un stade bien plus avancé que le statut de simple indépendance.


4. L'absence de droit à la sécession en droit international

La Déclaration, Résolution 2625 (XXV), du 24 octobre 1970, adoptée par l'Assemblée Générale des Nations Unies, sans opposition, et relative « aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les Etats conformément à la charte des Nations Unies », fait mention, également, du principe du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes.


Trois hypothèses sont mentionnées par la Résolution 2625 (XXV), de l'Assemblée Générale des Nations Unies : primo, la création d'un Etat souverain, secundo, la libre association et, tertio, l'intégration avec un Etat indépendant. Mais, tout ceci ne s'accorde pas avec le problème du Sahara occidental marocain, ni le dossier Kabyle. 

 

Le droit international n'a jamais fait mention et ne reconnaît pas un droit à la sécession, un droit à la dislocation de l'intégrité territoriale des Etats. Bien au contraire. Le Polisario n'est rien d'autre qu'un groupe politique armé sécessionniste, voire terroriste. Quant au Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie, la sécession ne semble avancée que comme suite au dépit devant la sourde oreille du régime militaire algérien, après la revendication, en vain, de l’autonomie pour la Kabylie. 

 

Il sied de préciser que la sécession se situe aux antipodes de la décolonisation. « En vain chercherait-on dans le droit positif un texte ou une pratique permettant de déduire un droit des peuples de faire sécession de leur droit à disposer d'eux-mêmes ». Notons que Georges SCELLE, écrit que : « Le droit des peuples comporte aussi le droit pour une collectivité étatique de maintenir sa cohésion vitale et sa solidarité particulière». 


5. Le droit à l'autonomie

Les droits de l'homme sont indissociables du droit des peuples à l'autodétermination, encore que l'exercice du droit des peuples à l'autodétermination n'assure pas, forcément et ipso facto, l'effectivité des droits de l'homme. Par contre, le choix de l'autonomie, comme système politique et juridique de gestion, est indéniablement la meilleure garantie d'un réel exercice, d'une effectivité de l'autodétermination, des droits de l'homme, du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes...


Le droit à l'autonomie, contrairement au droit à l'indépendance, est une véritable assurance pour les droits de l'homme, pour le développement, pour les libertés… 

6. L'autonomie comme libre et authentique autodétermination

Dans le cas des peuples colonisés ou sous tutelle, le principe du droit des peuples à la libre détermination s'entend traditionnellement comme : 

-      l'indépendance complète ;

-      l'incorporation à un autre Etat ;

-      l'adhésion à une forme de Fédération étatique.

 

Mais, il faut préciser que ces trois formes de libre autodétermination, y compris l'indépendance politique, ne traduisent pas, dans les faits, le libre exercice du droit des peuples à l'autodétermination. C'est pourquoi, à ces 3 formes classiques d'expression, traditionnellement connues et défendues, il faut en rajouter une 4e, à savoir la plus importante : l'autonomie. 

 

Ainsi, l'autonomie peut être considérée comme le stade suprême de la libre et authentique autodétermination des peuples, de leurs droits à disposer d'eux-mêmes et du droit à la décolonisation.


7. Le dépassement et la démystification de la fiction de l'indépendance
L'indépendance, en ce qui concerne les pays colonisés, est une étape vers la décolonisation pleine et entière à travers l'autonomie des populations concernées dans le self gouvernement. Carlogeropoulos STRATIS écrit : « La notion d'indépendance ne peut se cantonner uniquement au droit de l'accession à l'indépendance, car celle-ci est devenue une notion fictive. Ainsi, la fiction de la souveraineté formelle est appelée à se traduire par une souveraineté réelle et de fond ». 

 

Or, cette « souveraineté réelle et de fond », ne peut se faire que par et dans l'autonomie des populations concernées. Dans le même sens, NGuyen Quoc DINH écrit : « Pour les peuples constitués en Etat ou intégrés dans un Etat démocratique qui reconnaît leur existence et leur permet de participer pleinement à l'expression de la volonté politique et au gouvernement, il se traduit par le droit à « l'autodétermination interne », c'est-à-dire par un droit à la démocratie encore mal assuré et dans les Etats multinationaux, ou coexistent plusieurs peuples, par la reconnaissance qui affirme des droits des minorités, y compris les peuples autochtones. Mais, il n'en résulte en principe aucun droit à « l'autodétermination externe », lorsque celle-ci conduit à une sécession incompatible avec un autre principe fondamental du droit international contemporain, le droit des Etats à leurs intégrités territoriales».

 
Ainsi, c'est l'absence, voir le refus de concessions sur les droits de l'homme, la démocratie et l'accès à l'autodétermination en interne qui légitime le droit à l'autodétermination externe. Seul un régime politique discriminatoire justifie le recours à une autodétermination externe. Dans le cas du Sahara Occidental marocain, le territoire ainsi que ses populations ont, à contrario, bénéficié d'un statut privilégié par rapport aux autres régions du Maroc ; cela ne semble pas être le cas pour la Kabylie. L'indépendance étatique n'est pas en soi la réalisation effective, ni même l'objectif nécessaire des droits des peuples. La question centrale reste la libre démocratie, la libre expression démocratique égalitaire, sociale, économique, politique…

8. Le droit de l'Etat à l'unité et à l'intégrité territoriale

Le droit international public ne reconnaît pas un droit à la sécession, car cela va à l'encontre du droit de l'Etat à l'unité, à l'intégrité territoriale et à la conservation de la souveraineté Nationale. « Depuis la résolution N° 1514, de 1960, sur l'octroi de l'indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, l'unique solution de décolonisation retenue est celle de l'indépendance totale et en dehors de la manifestation de la volonté expresse des populations intéressées ».


9. La dénaturation des droits des peuples

L'histoire des décolonisations et « indépendances », dans la plupart des cas, a conduit à une véritable « dénaturation du droit des peuples ». Car, comme le dit si bien Carlogeropoulos STRATIS : « Limiter le droit à la libre détermination uniquement à la libération coloniale, présumer la volonté des intéressés et déclarer qu'une fois l'indépendance acquise, rien ne peut être mis en cause, concernant le statut qui en résulte, est contraire à la conception du principe même du droit des peuples et à l'idée démocratique où prime la volonté des intéressés ». 


10. La conciliation entre les droits des Etats et les droits des peuples

La résolution de l'équation tient à concilier entre le droit de l'Etat à la souveraineté et à l'intégrité territoriale et le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et à la libre autodétermination. Dès lors, le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes trouve son expression entière dans le concept « d'autonomie ». L'autonomie est un statut juridique qui permet à une population donnée, au sein d'un territoire, [faisant partie d'un Etat conservant sa souveraineté et son intégrité territoriale], d'exercer des pouvoirs et prérogatives plus ou moins larges de gouvernement et de gestion démocratiques. C'est cela vers quoi le Maroc s'engage, résolument, dans le respect du droit international des droits de l'homme. Pour s'en convaincre, il suffit d'examiner, sans parti pris, en toute objectivité et honnêteté intellectuelle le projet marocain de statut d'autonomie pour le Sahara. A charge, pour l’Etat algérien d’envisager, également, l’autonomie pour la Kabylie.

 

A bon entendeur salut

Temara, le 28 juillet 2021

Pr. Dr. Mimoun CHARQI

 

 

 


29/07/2021
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LE DIFFEREND HISPANO-MAROCAIN AU REGARD DU DROIT INTERNATIONAL CONTEMPORAIN

Le différend hispano-marocain au regard du

droit international contemporain[1]

                                                                 

                                                               

 

Honorable assistance, chers amis,...

 

La question de Sebta, Mellilia et les îles et îlots avoisinants revient au devant de la scène et fait l’actualité ces derniers temps. Mes propos ne sont pas tant de relater ce qui se passe aujourd’hui, aux points de passage, à Sebta et M’Ritch que de rappeler ce qui est légitime du point de vue du droit international.

 

La présence espagnole dans le Grand Rif date de plusieurs siècles[2]. Au début, et jusqu’en 1864, il est question de présides, de lieux où sont envoyés des prisonniers, des garnisons,... Au fur et à mesure du temps, les espagnols ont étendu leurs occupations sur le terrain[3]. A titre d’exemple, d’un simple rocher qu’était « Rosadir », la vieille ville, aujourd’hui « Melilla », « M’ritch »  en rifain, s’est étendue jusqu’à occuper une superficie de 12 km2.

 

Force est de rappeler que, lors de la résistance pour l’indépendance du Maroc, les guérilleros de l’Armée de Libération Nationale, ainsi que les activistes politiques de l’indépendance, trouvaient refuge dans la zone Nord du Maroc administrée par l’Espagne. La revendication directe et immédiate de ces villes et îlots ne s’est pas faite en même temps que la rétrocession de la zone Nord du Maroc sous protectorat espagnol, pour des raisons politiques. De là, certains parmi ceux qui s’efforcent de légitimer la présence de l’Espagne au Maroc distinguent entre places et territoires de souveraineté, d’un côté, et protectorat, de l’autre.

 

Aujourd’hui, nombre d’exactions aux droits humains et à la dignité de l’homme sont relevées, par la société civile, aux points de passages, sur les citoyens marocains. Ce sont dès lors deux points de droit, ou plutôt de non droit, de violations de droits, qui se posent. Le premier a trait au respect de la dignité humaine, et du droit international des droits de l’homme, tandis que le second se rapporte à la solution potentielle, au regard du droit international public, quant à la rétrocession des territoires actuellement occupés et administrés par l’Espagne.

 

Dans tous les cas, qu’il s’agisse du respect des droits humains ou de la décolonisation, il s’agit là de questions qui ne peuvent être réglées que pacifiquement, dans le cadre du droit, en garantissant et en préservant les intérêts des uns et des autres. Mais, il faut le dire, l’équation n’est pas simple à résoudre, car les deux problèmes sont en fait imbriqués l’un dans l’autre.

 

Initialement, mon exposé prévoyait de s’attarder sur la rétrocession des villes et îles et îlots au Maroc, sur les revendications et arguments de part et d’autre, au sujet des territoires occupés par l’Espagne et revendiqués par le Maroc,... Mais peut-on, compte tenu de ce qui se passe actuellement, passer sous silence les violations aux droits de l’homme, notamment, aux check points ?

 

I. Les exactions au droit international des droits de l’homme

Les atteintes et violations aux droits de l’homme sont doubles, en ce sens qu’elles peuvent être classées en violations contemporaines et passées.

 

1. Les violations contemporaines

Les médias, ainsi que la société civile rapportent, preuves à l’appui, les tabassages, brimades et autres dont ont fait l’objet, de façon régulière, des personnes d’origine marocaine, aux points de passages. Que ce soit du côté marocain ou espagnol, les atteintes aux droits humains sont condamnables et doivent être condamnées. Le fait que, de ce côté ci il puisse y avoir des dérapages et atteintes aux droits de l’homme ne justifie nullement que cela puisse se faire, également, de l’autre côté et, dans les deux cas, la justice doit se prononcer et faire son travail. Chaque fois qu’un ressortissant subit une atteinte à sa dignité et à ses droits, son Etat lui doit protection.

 

Si en règle générale, les populations autochtones ont pu vivre avec les populations  espagnoles sous bonne entente, cela n’a jamais empêché qu’il y ait pu y avoir des cas de dérapages, de racismes, de violations de droits,... Et dans tous les cas, l’exception ne fait que confirmer la règle générale qui veut que l’autochtone, d’origine marocaine, bénéficie de ses droits sur le territoire espagnol. Ce n’est pas sans raisons, si beaucoup, si ce n’est la plupart, ont la double nationalité, et bénéficient des droits et acquis que cela leur confère.

 

2. Les violations passées

L’occupation des territoires du Nord du Maroc, par le Portugal et l’Espagne,  s’est faite de façon belliqueuse, par les force des armes et canons, et a donné lieu à tout ce que peut engendrer la guerre. Sur fond d’agression militaire, viennent se greffer des traités. La lecture des traités signés entre l’Espagne et le Maroc, il faudrait dire « imposés » par l’Espagne au Maroc, permet de voir dans quelles conditions les droits des rifains ont été bafoués. Comment ils ont été spoliés de leurs terres, comment leurs maisons et champs ont été détruits, comment leurs mosquées et cimetières ont été rasés. Les traités, en particulier celui de 1862, prévoit des indemnisations des rifains pour la perte de leurs terres, maisons et autres biens et droits ; des indemnisations qu’ils n’ont jamais reçues à ce jour.

 

Les relations avec les autorités marocaines ont toujours été, tout le long de l’histoire, des compromis effectués sur le dos populations autochtones et au détriment de l’Etat marocain[4]. L’occupation et le dépeçage de l’Empire chérifien marocain, par les puissances occidentales du début du XXe siècle, a réduit le territoire à un ensemble amputé du Sahara oriental, de la Mauritanie, de plusieurs territoires avec le voisin algérien et Sebta, Melilia ainsi que les îles et îlots avoisinants.

 

Durant les agressions militaires dites de « pacification », pour l’occupation du Grand Rif, au début du siècle passé, les violations et exactions se sont poursuivies et perpétuées. L’histoire est là pour témoigner de la barbarie employée par les militaires espagnols, les nez et oreilles coupées, les têtes tranchées et offertes sur des corbeilles de roses[5], l’utilisation des armes chimiques de destruction massive,... le tout en violation du droit international.

 

Les dettes de l’Espagne sur le Maroc sont nombreuses ; on y retrouve la spoliation de personnes de leurs territoires et de leurs richesses, outre les exactions et violations perpétrées tout le long des guerres d’occupation dites de « pacification ». La question de la guerre chimique contre le Rif et les rifains est toujours en suspens et devrait à défaut d’un règlement amiable faire l’objet de poursuites en tant que crime contre l’humanité.

 

II. L’antagonisme des positions espagnoles au regard du droit

Outre la géographie et l’histoire, au regard du droit international public, les principes consacrés abondent en faveur du Maroc. Néanmoins, encore faudrait-il que le Maroc fasse preuve de plus d’ardeur diplomatique et juridique. Chacune des parties revendique les villes, îles et îlots, ici en question, avec des arguments qui au regard du droit international public ne se valent guère.

 

1. Le dualisme antinomique de la position espagnole

Au sein de la société espagnole, tandis que les uns se refusent à toute discussion, d’autres, plus sages, recherchent la négociation.

 

1.1. Les arguments des partisans espagnols du refus

Les arguments invoqués sont divers :

         1. La « terra nullius » 

« Certaines de ses possessions ont été occupées alors qu’elles n’appartenaient à personne (res nullius). C’est le cas de Melilla qui fut occupée en 1497 alors que ses habitants l’avaient désertée ou celui des chafarinas occupées quatre siècles plus tard en 1848, alors que la souveraineté d’aucun Etat ne s’y était affirmée de façon officielle. »[6].

 

         2. L’acquisition de Ceuta par Traité international avec le Portugal 

« Le cas de Ceuta est différent puisque la ville fut acquise en 1580 par l’Espagne après la réunion des royaumes du Portugal et d’Espagne sous Philippe II, puis plus officiellement par le Traité de 1668. Bien sûr, les portugais l’avaient conquise par la force en 1415, mais dans le cas de l’Espagne l’acquisition de Ceuta s’est réalisée par un Traité international en 1668 »[7].

 

         3. La pratique courante de la conquête militaire 

 « Dans le cas des peñones de Velez de la Gomera et d’Al Hoceima, leur acquisition s’est effectuée par une conquête militaire (ocupatio bellica) et une occupation effective ininterrompue à une époque où cela était une pratique courante »[8].

 

Les arguments historiques ne s’arrêtent pas là, puisque selon certains le lien est encore plus ancien :

         4. Des provinces de l’Espagne romaine 

« Déjà au IIIe siècle, le territoire de l’Afrique du Nord où se situent Ceuta et Melilla étaient une province de l’Hispania romaine sous le nom de Nova hispania ulterior tingitana (...)[9].

 

         5. La dépendance du Califat de Cordoue 

« A la période arabe, Ceuta et Melilla ont dépendu du Califat des Omeyades de Cordoue »[10].

 

                                                                                                            A suivre...



[1] Conférence livrée à l’occasion du colloque Sur le thème : « Ceuta, Melilla et les îles  à la lumière des expériences internationales et du droit international et leur place dans l’agenda des partis politiques marocains». Organisé par le CMCA, le  25 septembre 2010, à l’Hôtel Tour Hassan à Rabat.

[2] Les portugais prennent Sebta en 1415. En 1580, après la mort du roi du Portugal Don Sebastião, le Portugal a été rattaché à l'Espagne sous le Roi Philippe II et Sebta passe ainsi sous la domination espagnole. En 1640, lorsque le Portugal recouvre son indépendance, la ville de Sebta reste rattachée à l’Espagne. Melilla quant à elle est occupée en 1497. L'île de Nkour  (Peñón de Alhucemas) est occupée en 1673. La presqu'île de Badis (Peñón de Vélez de la Gomera) est occupée une première fois vers 1508 puis après de nombreuses conquêtes et reconquêtes, tombe en main des espagnols en 1564. La première conquête des îles chaafarines remonte à 1848. Elles sont récupérées par les marocains et reconquises par les espagnols à plusieurs reprises. L'île d'Alboran est occupée au XVe siècle.

[3] “(…) la inmensa mayoría del territorio actualmente ocupado por el Estado español en Marruecos proviene del despojo ocurrido a raíz de la Guerra colonial de 1860 y que de hecho hubo que esperar hasta finales del siglo XIX para que éste fuera tomado efectivamente, con el consiguiente expolio y deportación de sus dueños y habitantes marroquíes. El perímetro de Ceuta y Melilla anterior a esa fecha es una parte ridícula de las actuales plazas, (…)”. ANDALUCÍA LIBRE nº 116, Polémicas sobre las Colonias de Ceuta y Melilla, (4/5/2002).

[4] Le traité de paix et d’amitié de Tétouan du 26 avril 1860, à son article 3 prévoit : « (...) S.M le Roi du Maroc cède à S.M la Reine d’Espagne en plein domaine et souveraineté le territoire compris entre (...) ». L’article 8 prévoir que « S.M marocaine s’oblige à concéder à perpétuité à S.M catholique sur la côte de l’océan près de Santa Cruz la petite le territoire suffisant pour la formation d’un établissement de pêche (...) ». Le traité de Tétouan du 24 août 1859, prévoit à son article 1 : « S.M le Roi du Maroc (...) convient céder à S.M catholique en plein domaine et souveraineté le territoire limitrophe à la place de Melilla jusqu’aux points plus adéquats pour la défense et tranquillité de ce préside ». Traduction faite du texte espagnol.

[5] Voir Mimoun Charqi. Mohamed Abdelkrim El Khattabi : l’Emir guérillero. Collection Histoire et lectures politiques ? Rabat, 2003, pages 159 s.

[6] Yves Zurlo. Ceuta et Melilla : histoire, représentation et devenir de deux enclaves. P.128.

[7] Idem

[8] Idem.

[9] Idem. Notons que l’argument peut être renversé. En fait les romains eux-mêmes étaient des envahisseurs. L’on voit bien que l’émotion l’emporte sur la raison.

[10] Idem.


20/09/2010
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