GARANTIES & FINANCEMENTS, AU MAROC
GARANTIES & FINANCEMENTS, AU MAROC
M. le Président d’Alta-juris international, MM. les bâtonniers, chers amis juristes, j’ai la difficile tâche d’intervenir en dernier et tout particulièrement après le brillant exposé de Maître Azzam sur les garanties lequel, soit dit en passant, à parfaitement rendu compte des garanties en droit marocain, tout en brossant la comparaison avec le droit français. J’espère simplement ne pas répéter ce qui a déjà été dit, afin de ne pas vous ennuyer. Aussi, j’essayerai d’aborder le sujet en rebondissant sur certaines des questions qui ont été soulevées ou encore en apportant quelques précisons et compléments d’informations. Voyons dès lors ce qu’il en est du financement puis des sûretés, au Maroc.
I. Le financement au Maroc
1. Les banques marocaines sont au diapason du système financier international
Tout d’abord, il convient de noter que les banques marocaines offrent aujourd’hui les mêmes produits et services pouvant être offerts par n’importe quelle banque occidentale, tant à l’échelle locale qu’à l’international. Les règles prudentielles auxquelles les banques marocaines sont soumises sont d’ailleurs celles des accords de Bâle II. Les techniques sont pratiquement les mêmes de ce côté ci- que de l’autre côté de la Méditerranée[1].
2. Le banquier est un commerçant
Par ailleurs, s’agissant du rapport entre le financement et les garanties requises par le banquier, il ne faut pas oublier que le banquier n’est pas un bon samaritain, une société de bienfaisance quant-il exerce son métier, c’est un commerçant. Encore que cela ne l’empêche pas d’être une entreprise citoyenne qui peut faire dans le social,… Mais ce sont là deux choses tout à fait différentes.
3. La première des garanties est le projet lui même
Si, de par le passé, certaines banques marocaines ont pu avoir des attitudes critiquables eut égard à la relation avec les sûretés et le crédit pouvant être octroyé, [certaines banques n’hésitant pas à financer du moment que les garanties étaient suffisantes], toujours est-il que c’est là une pratique qui semble révolue. La première des garanties c’est le projet lui même, sa faisabilité, sa rentabilité,… La prise de garanties réelles ou personnelles n’étant qu’accessoires à la garantie offerte par le projet lui même ainsi que les qualités de son ou de ses promoteurs. L’élimination préalable des risques, la bonne étude du dossier, sont autant de raisons qui feront que le banquier financera ou pas le projet. Certes, il est d’usage d’entendre les entreprises se plaindre de la rigidité, voire de la frilosité des banques si le promoteur n’est pas à même d’offrir des garanties. Tout professionnel de la banque vous dira que ce qui importe le plus ce n’est pas d’avoir des garanties, mais un projet qui tienne la route, la question n’est pas d’avoir beaucoup de garanties mais des garanties suffisantes.
4. La responsabilité du banquier
A l’instar de ce qui se passe depuis des décennies en occident, la justice marocaine n’hésite pas à engager la responsabilité du banquier en raison d’un mauvais financement qui aurait conduit à un endettement par sous-financement ou sur-financement[2].
5. Quels sont les types de financements dont peuvent bénéficier les entreprises européennes au Maroc ?
Outre les produits et services classiques[3], il est indiqué que les ressortissants de l’Union Européenne recherchent des crédits de type capital risque.
II. Les garanties au Maroc
1. La complexité du droit marocain des sûretés.
Le régime des sûretés au Maroc n’est pas simple. Nous ne disposons pas d’un véritable Code des sûretés, simple, homogène,… Ce qui forme le droit des sûretés, c’est un ensemble de textes adoptés du temps du protectorat, puis souvent partiellement amendés ou abrogés. La lecture n’en est pas simple pour les personnes non averties et l’ensemble est assez complexe. Mais toujours est-il que les juristes doivent probablement s’en féliciter car quelque part ils ne peuvent qu’y trouver leurs comptes. En somme, il assez difficile de rendre compte autrement que sous forme de généralités des garanties au Maroc, dans le cadre d’un exposé, compte tenu des temps impartis[4].
2. Les privilèges
Le régime des privilèges est dualiste, on y retrouve des privilèges issus de la loi et des privilèges issus des conventions entre les parties. Souvent hormis les conventions entre les parties et les privilèges pouvant en découler, il faut tenir compte des privilèges prévus par la loi au profit des impôts, des salariés,…
3. Le droit des sûretés
Pour en venir aux garanties en usage au Maroc, il est possible de distinguer entre celles issues de la loi et celles issues de la pratique à l’échelle internationale, à savoir les garanties à première demande, payables comme le nom l’indique dès la première demande.
Les garanties issues de la loi peuvent être classées en garanties réelles et ou personnelles. Les premières comportent les hypothèques et les nantissements.
3.1. Les hypothèques sont terrestres (foncières) maritimes ou aériennes
Les hypothèques foncières ont cette particularité qu’elles ne peuvent porter que sur des biens immeubles immatriculés ou en cours d’immatriculation. Le régime foncier au Maroc comporte des propriétés immobilières qui ne sont pas encore immatriculées et que l’on nomme « melk ». Ces dernières peuvent être prises non pas en hypothèque mais en nantissement immobilier. Les textes, règles et conditions requises pour la prise de ces garanties, voire leurs réalisations, sont différentes.
Les hypothèques aériennes et maritimes, quant à elles, sont régies par le même texte de base, en l’occurrence le Dahir du 31 mars 1919 formant code de commerce maritime[5], tel que rectifié.
3.2. Les nantissements mobiliers peuvent être distingués selon qu’il s’agisse de nantissement avec ou sans dépossession. Les nantissements avec dépossession qui portent le nom de gage sont : les nantissements de titres, d’espèces, d’effets de commerce, de bons de caisses, de dépôt à terme, de bons du trésor, de police d’assurance, de marchandises, de marché public, et de véhicule roulant.
Les nantissements sans dépossession sont le nantissement de certains produits et matières, de fonds de commerce, d’outillage et matériel d’équipement, de produits agricoles,…
3.3. Les sûretés personnelles, quant à elles, sont les cautions personnelles, qui à l’occasion peuvent être avec affectation d’hypothèque(s) ou de nantissement(s), des cautions bancaires et des fonds de garanties divers mis en place par l’Etat afin de soutenir ou promouvoir des actions ou un secteur particulier. Parmi les cautions bancaires on retrouve toute la panoplie des cautions administratives, douanières ou diverses.
4. La possibilité de prendre des garanties à l’étranger
Est-il possible à l’occasion de la demande d’un crédit, auprès d’une banque marocaine, d’offrir des garanties situées à l’étranger, comme par exemple une hypothèque immobilière ? A priori, rien ne s’y oppose pour autant que les conditions requises pour la validité juridique prévues par le droit du pays où le bien se situe soient respectées. Notons, également que d’autres types de sûretés peuvent être envisagées.
[1] Il convient de noter que diverses banques françaises contrôlent des banques marocaines, via les prises de participations.
[2] Sur la responsabilité du banquier, voir Mimoun CHARQI. Droit bancaire marocain. Collection banque & entreprise. Rabat, 2004, pages 99-143.
[3] Pour avoir une idée de ce que peuvent être ces produits et services, il suffit de se connecter sur les sites des banques marocaines sur Internet.
[4] Pour plus d’information sur les garanties au Maroc, voir Mimoun CHARQI. Droit des sûretés du crédit. Collection banque & entreprise. Rabat, 2001, 232 pages.
[5] En sus de ce texte, il faut rajouter pour les hypothèques aériennes le décret N° 2 – 61 161, du 10 juillet 1962.
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